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26 décembre 2009 6 26 /12 /décembre /2009 08:55

Villerouge-la-Crémade : Sur Villerouge I

 

Paulette Pauc

 

Description d'un phallus en calcaire gris piqueté et partiellement poli (fig. 1), de forme cylindro-tronconique pour sa particularité et sa rareté (découverte de B. Pauc). L'objet présente une base à la surface brute en plan incliné qui le positionne à ± 80 °. La longueur maximum d'une part est de 15,2 cm et à l'opposé de 13,8 cm. La base est de section ovale de 5,9 cm par 5,5 cm. Dans la partie médiane de la pièce les dimensions sont de 5,3 cm par 4,5 cm. L'extrémité retravaillée par des enlèvements en éclats, puis partiellement polie, se démarque du corps de la pièce ; à la limite de ces modes technologiques les dimensions deviennent respectivement 4,3 cm par 3,9 cm.

Le plus proche parallèle connu est l'exemplaire de Newgrange, d'après la description faite sur le plan technique puisque la pièce est partiellement polie ; par contre il est en grès et plus cylindrique (M. J. O'Kelly, 1998).

En comparant ces deux derniers modèles, il ne fait aucun doute que ces pièces archéologiques soient des phallus et ceci permet de lever le point d'interrogation de M. J. O'Kelly quant à sa détermination.

Un autre exemplaire, de taille plus réduite et perforé pour vraisemblablement être porté comme pendeloque a été découvert à  “La Finca del Valent” sur la Terrassa de Palau (Amposta), sur le territoire de l'embouchure de l'Ebre (Esteve Galvez 2000).

L'attribution chrono-culturelle Campaniforme du modèle irlandais pourrait orienter la phase ancienne d'occupation du site audois au Néolithique final – Chalcolithique.

 Ces représentations phalliques jouent un rôle cultuel et symbolique en relation avec la fertilité ou un rôle protecteur.

 

Références bibliographiques

- Esteve Galvez (F.). Recerques Arqueologiques a la Ribera Baixa de l'Ebre (I) Prehistoria, Museu del Montsià, Ajuntament d'Amposta, 2000, 314 p.

- O'Kelly (M. J.). Newgrange. Archaeology, Art and Legend. Reprinted Thames and Hudson Ltd, London, 1998, 240 p.

 

Référence biblio

PAUC P. 2004 :

Villerouge-la-Crémade : Sur Villerouge. Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, t. CIV, note d’archéologie, p. 196.

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15 décembre 2009 2 15 /12 /décembre /2009 18:26

BREVE TYPOLOGIE DE L’OUTILLAGE LITHIQUE INHERENT

A LA FABRICATION DE PARURES PROTOHISTORIQUES EN COQUILLAGES

 ET LES SOURCES DE MATIERES

 

Paulette PAUC*

Avec la collaboration de Didier Bohic et Philippe Fauré

 

L’outillage lithique retrouvé sur les ateliers de fabrication de parures en coquillages est essentiellement composé de perforateurs en silex, puis en moindre nombre, de meules en grès et, beaucoup plus rares, de polissoirs. Les données recueillies permettent d’esquisser un schéma typologique. L’origine des matières premières est recherchée dans le cadre des stratégies d’acquisition. Les outils sont comparés à ce qui est connu en France, en Europe et en dehors du cadre européen.

 

Mots clés : Protohistoire, outillage lithiques, meules, perforateurs, polissoirs, géologie.

 

A BRIEF DESCRIPTION OF STONE TOOLS USED IN THE MANUFACTURE OF NEOLITHIC SHELL BEADS AND THE RAW MATERIAL

 

Most of the stone tools found at the shell jewellery workshops are pointed flints ; others are sandstone grinders, and, much less common, polishers. The data collected has enabled me to draw up to a topological classification. The origin of the raw material is investigated according to a strategy of collection. The tools are compared to similar items from France, Europe and beyond.

 

Keys words : Neolithic (protohistoric), grinders, pointed flint, polishers, stone tools, geology.

 

L’activité de fabrication de parures en coquillages marins sub-fossiles se déroule, dans l’Aude, entre le Néolithique récent-final et le Bronze ancien (Fig. 1). L’outillage lithique, lié à cette activité, n’est pas un marqueur chronologique précis. Il est ponctuellement connu sous la même forme dès le Néolithique ancien dans d’autres régions de France et sur quelques sites méditerranéens. L’avancée de l’étude en cours permet de faire le point et de proposer ici un bref schéma typologique qui sera développé dans le mémoire du diplôme de l’EHESS. Les données géologiques complètent la recherche et, par conséquent, font progresser les travaux expérimentaux effectués parallèlement à l’étude du matériel archéologique.

 

Figure 1 : Carte de Répartition

 

HISTORIQUE ARCHEOLOGIQUE ET ETHNOLOGIQUE

 

LES MEULES-POLISSOIRS DE GRES

 

Les pierres de grès sont de simples supports qui permettent, par frottement, de pratiquer une perforation intentionnelle sur des coquillages entiers afin d’obtenir des pendeloques et des grains d’enfilage. Avec l’élaboration plus complexe des éléments de parure, ces matériaux passent à des fonctions spécifiques et prennent des formes particulières qui en font des outils à part entière.

Une série d’instruments abrasifs en grès siliceux et calcaire, à grain fin, a été initialement rattachée à la chaîne opératoire de la fabrication des rondelles d’enfilage en Cerastoderma glaucum (Pauc 1997). Par la suite, de nouvelles découvertes ont permis d’ébaucher un classement (Pauc 2000, 2002).

En dehors de l’Aude, une seule meule en grès (appelée polissoir) a été identifiée parmi l’outillage lithique lié à un atelier de production de rondelles d’enfilage en lignite (déterminé comme de la houille), à Saint-Rabier, sur le site néolithique du « Muguet-Ouest I », en Dordogne (Poissonnier, 2001).

L’emploi de meules en grès, jouant le même rôle dans la chaîne opératoire de rondelles d’enfilage en coquillage, est attesté dans les Iles Salomon, comme en témoigne l’étude ethnologique incontournable publiée dès 1922, puis largement diffusée jusqu’à nos jours (Malinovski 2002).

 

LES PERFORATEURS EN SILEX

 

Ces petites pointes sont plus amplement identifiées, sans toutefois être intégralement étudiées ; seules les pièces les plus caractéristiques sont publiées.

Dans un premier temps dix-sept perforateurs ont été brièvement décrits (Pauc 1997). Ensuite deux modèles fusiformes ont été proposés pour illustrer le résumé de fabrication (Pauc 2000). Enfin, trois exemplaires représentent les pièces lithiques fusiformes standardisées (Pauc 2002).

- L’abri de la « Font des Pigeons » (daté du Néolithique ancien), à Châteauneuf-les Martigues, a livré une grande quantité de perforateurs dont seuls quelques éléments ont été décrits (Binder 1987) puis illustrés dans un résumé de fabrication des rondelles d’enfilage (Courtin 2000).

- Des milliers de “perçoirs” ont été mis au jour dans l’atelier artenacien (Néolithique final) de Ponthezières, sur l’Ile d’Oléron, toutefois très peu d’exemplaires figurent dans le mémoire de thèse de Laporte (1994). Suite à ce travail universitaire, quelques nouveaux modèles issus des fouilles ont été proposés par Ricoux et Esnardt (2000).

- Sur le site de « Cabecicos Negros » (Néolithique moyen), à Vera (Almería, E), sont apparus quelques petits “perçoirs” en bout de lamelles destinés à la perforation des éléments de parures en test (Goñi Quintero et al. 1999).

- A Cahokia, dans le sud-est des Etats-Unis, des sites datés entre 900 et 1400 de notre ère ont livré des “microlithes” en relation avec la chaîne opératoire de fabrication de rondelles d’enfilage en test, d’après leur morphologie et les résultats des analyses tracéologiques (Yerkes 1997, 1998).

En publiant quelques exemples de perforateurs, j’abordais le problème de leur emmanchement, dans le cadre de mes expérimentations, étant donné que la taille de ces petits outils lithiques n’en permet pas la manipulation directe (Pauc, 1997, 2000, 2002).

- M. A. Miller (1996) s’est exercée à reproduire les rondelles d’enfilage en Cerastoderma glaucum à partir des données obtenues sur le site-atelier de Franchthi, en Grèce continentale, daté du Néolithique ancien. Elle utilisa un foret à archet inspiré d’un modèle indien de l’Amérique du Nord. De l’étude des perforateurs de ce site grec, seuls les plus caractéristiques ont été représentés par C. Perlès et M. Ballinger-Reduron. Jugées plus longues à l’origine, ces mêmes pièces ont été republiées en rajoutant des pointillés, à la base de certaines d’entre elles, dans le but de justifier une utilisation directe faute de preuve d’un quelconque système d’emmanchement (Perlès 2001).

- En 1993, N.N. Skakun tentait la reconstitution d’un foret à pompe, équipé d’une pointe en silex, dont le volant est une réplique d’un disque en terre cuite retrouvé en Bulgarie au IIIe millénaire avant J.-C.

- En 1922, B. Malinovski (2002) photographiait les indigènes des Iles Salomon maniant un foret à pompe archaïque pour perforer des rondelles d’enfilage en coquillage.

 

LES POLISSOIRS A GORGE

 

L’équipement lithique se complète de polissoirs à gorge servant à calibrer la tranche des rondelles d’enfilage.

- Un premier exemplaire de polissoir à “rainure”, qui correspond en fait à une gorge en U, a été découvert sur « Le Chemin de Sens » (Néolithique ancien) à Marolles-sur-Seine. Cette pierre, de dimension réduite, a servi à calibrer des rondelles d’enfilage en calcaire (Augereau et Bonnardin 1998).

- Sur l’Abri de la « Font des Pigeons » (Néolithique ancien), à Châteauneuf-les-Martigues, apparaît un polissoir, de petit gabarit, à quatre gorges en U (Courtin 2000).

- Le site-atelier de « Saint-Cristol III », à Fontjoncouse, a livré deux polissoirs de taille modeste, en grès fin, à une gorge rectiligne et deux gorges curvilignes en U (Pauc 2003).

- En Guadeloupe, dans la période Saladoïde (500/400 av. J.-C. à 600/850 ap. J.-C.), les rondelles d’enfilages en test de Strombus gigas étaient vraisemblablement calibrées à l’aide d’un polissoir, tiré d’un petit bloc de corail massif, qui présente deux gorges en U rectilignes (Delpuech 2001).

- Au même stade artisanal, les insulaires des Iles Salomon calibraient, par contre en série, les rondelles d’enfilage en test, dans la gorge en U d’une grosse pierre de grès (Malinovski 2002).

 

GEOLOGIE

 

Les données géologiques présentées ici découlent de trois démarches distinctes :

- L’examen des cartes géologiques, bases de données utilisables pour orienter les investigations de terrain de manière générale.

- La recherche bibliographique et l’étude des publications qui visent des époques, puis ciblent des étages géologiques permettant ainsi de poursuivre plus commodément les prospections.

- La prospection de terrain à l’origine de découvertes inédites.

 

L’OUTILLAGE ABRASIF A COMPOSANTE SILICEUSE

 

Un grès ferrugineux à granulométrie variable d’âge Sénonien (Crétacé supérieur) est majoritairement employé par les artisans audois. Ses principales zones d’affleurement sont : « La Pinède » de Durban (Azéma et al., 1963 ; Barrouquère et al., 1977), le « Bois de La Pinède » à Boutenac (Ellenberger et al., 1987) et les lieux-dits attenants « La Pinède »-« Bois du Vicomte »-« Bois de Loumet »-« Massif de Fontfroide » sur Saint-André-de-Roquelongue, Bizanet, et Narbonne (Ellenberger et al., 1987 ; Lespinasse et al., 1982).

On note aussi l’usage de grès calcareux issu de l’érosion des reliefs, probablement recueilli dans les éboulis de bas de pente ou les charriages à portée de quelques sites.

 

LES PERFORATEURS

 

Cette petite industrie lithique a été principalement réalisée à partir d’éclats de débitage de silex à patine blanche. Grâce à une meilleure préservation dans le sol, d’autres montrent la couleur d’origine, visible au niveau d’une cassure ou bien sur l’ensemble de la surface. Le silex vitreux, brun translucide, domine. Une gamme de beige se décline également. Au toucher, on perçoit occasionnellement la très grande finesse du silex porcelainé d’un blanc très pur. Un petit apport de silex microgrenu est également constaté parmi les séries étudiées.

 

La Montagne d’Alaric

 

Les auteurs de la feuille de Capendu de la carte géologique au 1/50 000 et la notice qui l’accompagne (Ellenberger et al. 1987) occultent le plus considérable des accidents siliceux de l’Aude présent dans les calcaires lacustres paléocènes du Thanétien supérieur (ancien Sparnacien des auteurs) de la Montagne d’Alaric. Les découvertes de terrain, réalisées ou non à partir des ouvrages géologiques consultés, permettent d’en délimiter l’extension et d’en repérer les meilleurs affleurements.

A. de Lapparent (1948) localise le premier du silex blanc du “Sparnacien”, à l'Ouest de la « Métairie Durand » sur Comigne. Bigot (1965) observe le sommet du même horizon et remarque que ce faciès rappelle celui du calcaire thanétien de Montolieu. L’intensité de la silicification diminue au NW de Camplong sur le « Mourel des Mouches ». Plaziat (1966) inventorie les accidents siliceux  qui patinent en blanc dans le sommet du Thanétien supérieur (Ouest de la « Métairie Durand » sur Comigne ; SO de « Bouscarrou » à Douzens ; Ouest du « Four à Chaux », Ouest de la « Côte Lisse » sur Moux ; ”Nord“ de Camplong ; Nord du « Roc de Gasque » sur Montlaur). Des silex à cassure noire à brun-noir veiné de blanc bleuté sont uniquement représentés à l’Ouest de la crête de « Sire » sur Montlaur. Le plus gros affleurement observé par l’auteur, au Nord de Camplong, atteignait plusieurs dizaines de mètres de longueur sur cinquante centimètres d’épaisseur (Plaziat, 1966, 1984).

 

Selon Plaziat et ses collaborateurs (1987), les accidents siliceux seraient issus de l’épigénisation de pseudomorphoses de gypse, calcitisés, puis transformés en calcédonite ou en quartz, suite à une percolation d’énormes masses d’eau chargées en silicates. Cet évènement se serait produit à une période récente, pourquoi pas au Néogène, dans des terrains asséchés et fissurés au cours d’un épisode climatique de type sahélien. Ce silex supergène s’apparenterait aux meulières du Bassin Parisien.

Nos prospections ont permis d’ajouter l’important affleurement de silex, à patine blanche, visible sur « La Peyrouse-Sud »-« Combe Torte »-« Combe Douzeille » à Moux (cf. sortie géologique de l’Alaric du mois de juin dans ce bulletin). De même, émergent en différents points du vaste lieu-dit « L'Alaric Sud » à Comigne, des bancs de silex d’une vingtaine de centimètres d’épaisseur et des blocs isolés de taille et d’aspect divers, vitreux, brun fumé à beige translucide, parfois opalescent à surface mamelonnée, avec des fissures remplies de micro-quartz ou encore grenu qui se décline dans une gamme de grisés et veinés de tons plus tranchés, etc.

Ces données sont complétées par la découverte de nouveaux affleurements, toujours dans le Thanétien supérieur, au NO de « Sire » et « Au Picou » sur Montlaur.

 

Le Tertiaire du Bassin de Sigean

 

Un autre très important accident siliceux est contenu dans les calcaires lacustres tertiaires de l’Oligo-Miocène du bassin sédimentaire des environs de Portel-Peyriac-Sigean-Roquefort.

Au pied du versant sud de « Chante Perdrix » sur Portel-des-Corbières, les calcaires oligocènes ne livrent que du silex vitreux, beige clair translucide et légèrement opacifié. Le silex vitreux, brun sombre, commun au bassin aquitanien (Miocène inférieur) de Sigean apparaît plus à l’Est, dès « L'Airevieille », et plus en avant sur « Mattes-Les Courtalous » (Vaquer 1993). Il affleure également au-dessus de la plâtrière, sur « Le Pré d’Audène », associé à un silex gris-beige opaque faiblement rubané.

A Peyriac-de-Mer, Coffyn et Fabre (1962) sont les premiers à remarquer que des lamelles recueillies sur « l'Ilette » sont comparables au silex du “Doul”, autrement dit du « Moulin de l'Ile ». Du silex opaque clair et marron ocre accompagne le silex brun du bassin lacustre. J. Barrière (1966) note la présence de lydiennes dans le dépôt coquillier eutyrrhénien de ce gisement. Le silex et les lydiennes du “Doul” sont reconnus parmi les artefacts du site ennoyé de Leucate-Corrège daté du Néolithique ancien (Masson 1984).

Aux alentours de Sigean, sur pratiquement toute la « Presqu’île de Caussagues », de « Port Mahon » à « Saint-Michel » et des « Cabanes » à « l’Angle », apparaît le silex analogue. Dans son inventaire des ressources, Simonnet (1985) reconnaît le silex à bouillies de characées des calcaires lacustres de Sigean parmi la trentaine de variétés employée pour les artefacts magdaléniens du site ariégeois. Le second secteur réunissant « Bérade »-« Les Potences »-« Le Peyrou » offre une silicification qui varie du sud au nord (la localisation a été indiquée par M. Pala). L’on passe d’une chaille quasi indistincte du calcaire gris encaissant, à une matière grenue assez bien silicifiée, opaque, teintée d’un dégradé de beige et de gris, avec des fissures remplies de micro-quartz et plus rarement quelques passées opalescentes, puis à l’excellent silex vitreux, brun sombre, au cortex calcaire lacustre blanc pulvérulent bien connu.

Vaquer (1993) signalait du silex dans les environs de Roquefort d’après le travail universitaire de Wilson. La recherche s’est déroulée à partir de Montpezat, (sur une indication de F. Briois de l’EHESS). L’ampleur du gisement s’étend de « Montpezat Sud » vers « Les Fangasses » et se poursuit sur la partie Nord du plateau du « Plat de la Font ». Deux matières siliceuses sont présentes : un excellent silex vitreux, dont la teinte se décline du brun sombre courant au gris-beige très clair, translucide à opaque qui se patine en blanc porcelainé et occasionnellement rouille, auquel s’associe silex calcédonieux, ou silex jaspé, jaune ferrugineux, pur ou veiné de brun sombre à noir, qui se mélange également au silex précédent.

 

Le Trias moyen des Corbières méridionales et orientales

 

Dans le Trias moyen ou Muchelkalk, le degré de silicification est très disparate. On fera la distinction entre le silex et les chailles.

Barrouquère et ses collaborateurs (1977) signalent des calcaires ocres bien lités à accidents siliceux dans la coupe 13c du Ruisseau de Fontbourque à Albières (itinéraire 3 du guide géologique entre Albières et le Pont d'Orbieu)

Dans la haute vallée de l’Orbieu, Vaquer (1993) indique du silex gris-beige faiblement zoné sur « Les Moulines » à Auriac. L’expansion du gîte s‘étend jusqu’à la « Grange de Vidal ». L’acquisition de la matière a pu se faire soit en exploitation directe dans un affleurement de la roche ou bien dans les éboulis de bas de pente. Plus au sud, entre « Le Sarrenc » et « Le Col de Redoulade » (Fréchengues et Peybernès, 1991), on le retrouve sous forme de rognons de chailles très broyées mais également de masses de chailles très friables et non pas de silex.

Une qualité de silex comparable au gîte « Les Moulines-Grange de Vidal » d’Auriac existe sur Fourtou à la convergence des lieux-dits « Le Mounac Ouest »-« Bergerie de Tisseire »-« Sarrat de Bernichou ».

A Durban-Corbières, dans la coupe de la paroi à l'ouest du plateau de « La Bouissière », on observe des nodules pluricentimétriques de chailles grises fissurées (Fréchengues 1988) et non de silex. L'acquisition ne peut se faire que dans les éboulis au pied de la paroi.

Un niveau à silex est également présent dans la coupe de « La Carrière » selon Vila (1965) et Fréchengues (1988) ainsi que dans la coupe de « La Berrière » d’après Fréchengues (1988).

Dans le secteur de « La Serre de Ginoufré » à Albas, Azéma et ses collaborateurs (1963) signalent des calcaires à lits et rognons siliceux noirs. Sur la même zone, Fréchengues (1988) distingue des silex roux dans la coupe de « La Mouillère ».

 

Autres origines

 

Dans le Dévonien, sur « La Rouquette », à Vignevieille, les calcaires à chailles portés sur la feuille de Tuchan de la carte géologique au 1/50 000, par Berger et ses collaborateurs (1997), fournissent un affleurement de chailles grises dont la meilleure semble avoir été exploitée selon D. Bohic. Quelques tessons modelés ont été repérés en plus d'un éclat retouché déjà signalé (Pauc 1997).

 

Le silex du Crétacé inférieur du « Plan de Couloubret » et de « Sainte Eugénie », à Portel-des-Corbières (Charrière 1979 ; Masson 1984 ; Ellenberger et al., 1987 ; Vaquer 1993), aurait été utilisé par les hommes du Néolithique ancien de Leucate-Corrège. Ce même silex à cassure orangée se retrouve sur « Combe de Berre » et au « NE de Ripaud » sur Villesèque-des-Corbières (Charrière 1979).

 

Les calcaires aptiens (Crétacé inférieur), situés au sud de la Pinède de Durban, renferment des chailles grises passablement faillées dont on aura du mal à extraire un petit outillage correct (Azéma et al. 1963).

 

Dans les grès crétacés (Sénonien) de « La Pinède » de Durban, des restes d’accidents siliceux subsistent dans les charriages. Sur la piste de la Pinède, on recueille occasionnellement des cassons et des rognons pluricentimétriques de silex gris translucide à opaque dont on peut parfaitement tirer du petit outillage. Les géologues notent la présence de galets siliceux d’origine détritique dans cette zone (Azéma et al. 1963).

 

Les calcaires palustres du Maastrichtien (Crétacé supérieur) d’Albas contiennent des nodules de silex millimétriques pouvant atteindre quelques cm3 (Plaziat et al., 1987).

 

Dans des terrasses datées du Miocène continental, les explorations ont permis de découvrir fortuitement des restes d’accidents siliceux d’origine détritique (Ellenberger et al.1987), localisés sur « L'Auzinelo-Las Espesolos » et « L'Albezou » à Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse et sur « Pré Giniès » et « La Taurizane » à Talairan. La matière siliceuse se présente sous forme de cassons centimétriques à décimétriques qui possèdent en partie du cortex : des “galets” fracturés et des rognons libérés ou pris dans un ciment calcaire ; leur couleur est jaune à marron clair dans des versions opaque à translucide. Ce “silex” a été apporté intentionnellement sur quelques sites autour de cette localité et jusqu'au village de Jonquières, sans toutefois, à priori, avoir été utilisé. La silicification est bonne et peut largement permettre d'en tirer du petit outillage.

 

Dans les calcaires du Lias (Jurassique inférieur) (Fauré 2002), les accidents siliceux à type de chailles, plus rarement de silex, sont très fréquents dans l’étage Sinémurien. Parmi les nombreuses localités nous retiendrons la coupe naturelle offerte dans la gorge entaillée par le ruisseau de « La Serre de Gauja », à Feuilla. Elle offre des lits de chailles grises centimétriques assez faillées dont on peut recueillir des petits blocs dans les éboulis pour en tirer des micro-pointes.

Dans la coupe du « Petit Guimont » à Fontjoncouse, des bancs de chailles grises décimétriques très faillées, relativement mieux silicifiées que dans le gîte précédent, n’auraient pu être récupérées que dans les éboulis de pente et éventuellement employées pour réaliser des micro-pointes.

A « Roque Sestière », dans le massif de Boutenac, on ne récupère en éboulis sous la paroi naturelle que des blocs de chailles centimétriques grise et beige assez faillées qui présentent un gradient de silicification d’un bloc à l’autre. Limités par l’épaisseur, on ne peut en tirer que de minuscules outils. « La Carrière » fournit également des blocs de chailles grises très faillées dont l’utilisation semble encore plus limitée.

A Montredon-des-Corbières, à la base de la coupe de la carrière et dans les éboulis de parois du « Pech du Fournas », on a le choix entre diverses qualités de silex et de chailles parmi les différents accidents siliceux logés dans la roche. Les blocs de silex pluricentimétriques de bonne qualité recueillis permettraient d’en obtenir du petit outillage.

 

Dans les calcaires du Jurassique moyen, (étage Aalénien), au « Roc d'Agel », à Névian, plusieurs niveaux d’accidents siliceux à patine rousse sont inclus dans les calcaires : des nodules de chailles décimétriques broyées, des petits bancs de chailles faillées et des nodules pluricentimétriques à cassure conchoïdale dont on pourrait extraire du petit outillage.

 

OUTILLAGE : brève typologie

 

LES MEULES-POLISSOIRS EN GRES SILICEUX ET CALCAREUX, A GRANULOMETRIE VARIABLE

 

Ce macro-outillage a déjà fait l’objet d’un classement typologique de base (Pauc 1997, 2002). La nouvelle série appartient aux trois groupes établis jusqu’à maintenant (Fig. 2).

 

Figure 2 : Type des meules

 

La morphologie de la meule-polissoir du « Muguet-Ouest I » à Saint-Rabier s’apparenterait au type M2, d’après la photo (Poissonnier 2001).

 

LES PERFORATEURS EN SILEX

 

Une série inédite de perforateurs en silex fait l’objet d’un complément de classement (Fig. 3). Cette petite industrie lithique standardisée mesure de 1,5 à 2 cm de long suivant le degré d’usure des pièces. Parmi le matériel étudié on isole des micro-pointes (n’excédant pas 1 cm)

 

Figure 3 : Types des perforateurs

 

Les perforateurs fusiformes figurent largement dans les publications. Leur morphologie spécifique ne peut échapper aux chercheurs, y compris certains modèles obtenus à partir de lamelles de débitage étroites du Néolithique moyen (Binder 1987 ; Courtin 2000 ; Goñi Quintero et al.1999 ; Laporte 1994 ; Miller 1996 ; Pauc 1997, 2000, 2002 ; Perlès 2001 ; Poissonnier 2001; Ricou & Esnardt 2000 ; Yerkes 1997, 1998).

Les perforateurs crantés unilatéralement tirent sur la morphologie piriforme et le caractère polyédrique ce qui amènera à créer des variantes ; l’un d’eux a une allure allongée (Pauc 1997).

En observant la planche publiée par Perlès (2001), on remarque que l’atelier de Franchthi livre des micro-pointes de 1 cm ainsi que des pointes standardisées de 2 cm de long. Les formes sont principalement de type p1 et p4 ; les modèles p3 et p6.1 sont également représentés.

 

LES POLISSOIRS A GORGE EN GRES SILICEUX

 

Le classement prend en compte l’orientation et le nombre de gorges (Fig. 4). Cette méthode permettra de créer autant de types que nécessaire. Le polissoir à quatre gorges en U rectilignes (Courtin 2000) correspondrait au type P1.4 et le modèle guadeloupéen (Delpuech 2001) au type P1.2.

 

Figure 4 : Types des polissoirs

 

Le petit nombre d’instruments publiés ne permet pas encore de généraliser les gestes automatiques des artisans. Les différentes perfections du calibrage des rondelles d’enfilage suggèrent que le geste automatique ne soit pas complètement acquis : enfants en apprentissage, probablement (Pauc 2000, 2002).

 

CONCLUSION

 

Au cours des stratégies d'acquisition diverses sources de matières premières ont été directement repérées grâce à l'amplitude des gisements mais découvertes aussi d'une manière fortuite lorsque ces derniers sont à peine apparents. La complexité du cadre géologique des Corbières a représenté un attrait pour les groupes humains qui avaient la possibilité de se fournir autour des habitats de plein air, des grottes et abris, mais également par le biais d'échanges s'effectuant entre le littoral et l'intérieur des terres ainsi qu'à l'intérieur même des terres (Pauc 2002).

L’utilisation du silex du Muchelkalk de la haute vallée de l’Orbieu est attestée par la découverte d’une lame et d’un éclat sur Saint-Pierre-des-Champs (collection Jean Burgat du Dépôt archéologique de Carcassonne) ainsi qu’un éclat sur « La Poubrego » à Villesèque-des-Corbières.

Le jaspe jaune de Roquefort-des-Corbières correspond à une armature de flèche à tranchant transversal trouvée sur « Saint-Cristol » III à Fontjoncouse.

Le matériel lithique employé pour la confection des éléments de parure n’a pu être mieux étudié faute de moyens techniques adaptés (constitutions plus précises des matières et tracéologie).

Les Corbières recèlent suffisamment de ressources lithiques de base pour permettre aux groupes humains de s'implanter dès le Paléolithique de façon durable. Les profonds changements dans les modes de vie, à partir du Néolithique, conservent par tradition certains moyens d'acquisition tandis que d'autres cessent par nécessité, en conséquence les réseaux se voient modifiés.

Les massifs gréseux, géographiquement situés à portée de la ramification des voies naturelles de circulation, auraient pu fournir autant de matériel de meunerie et d’instruments d’abrasion et de polissage que nécessaire.

Les principaux pôles d'acquisition du silex correspondent aux accidents siliceux directement accessibles de notre département.

Le silex de l’Oligo-Miocène du bassin de Sigean est reconnu dans le fonds commun de l'outillage lithique des sites-ateliers de fabrication de parures. Cette exploitation est liée à celle des coquillages sub-fossiles eutyrrhéniens destinés à la parure (Pauc 2000, 2002) sur les localités de Sigean et de Peyriac-de-Mer.

Le silex à patine blanche porcelainée et, exceptionnellement, le jaspe jaune de Roquefort-des-Corbières ont diffusé sur les localités environnantes.

L'accident siliceux à patine blanche, présent dans le calcaire lacustre du Thanétien du Massif de l'Alaric, est l’affleurement accessible, le plus considérable, exploitable sur deux localités : « L’Alaric Sud » à Comigne et « La Peyrouse-Sud »-« Combe Torte »-« Combe Douzeille » sur Moux. Le petit affleurement de silex noir et gris sombre situé « Au Picou » et sur « Sire », à Montlaur, est propre à une exploitation de faible ampleur. L’éventail des qualités et la palette des couleurs rendent difficile les comparaisons avec les différentes sources de matières premières majoritairement présentes dans les calcaires lacustres. Seules des études en laboratoire, à partir d’une lithothèque locale, permettraient d’affiner les données, comme le préconisait Y. Gillet en 1979.

Bien que toutes les conditions soient réunies pour réaliser une très grande quantité d'éléments de parure, la majorité des outils indispensables à la production locale n'a pas encore été découverte.

Deux points forts se dégagent de cette communication : l’analyse archéologique qui montre l’emploi des matériaux locaux pour confectionner l’outillage lithique et la recherche géologique qui permet de réviser et d’étendre nos connaissances sur les accidents siliceux en général et, en particulier, ceux de deux bassins lacustres d’époques différentes en Pays audois. 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

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- Plaziat (J.-C.). Le domaine pyrénéen de la fin du Crétacé à la fin de l'Eocène. Stratigraphie, paléo-environnements et évolution paléogéographique. Thèse d'État, Université Paris Sud, 1984, 1362 p., 528 fig., 105 pl.

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- Vila (J. M). Contribution à l'étude géologique de la région de Durban-Corbières (Aude). DES, Université de Paris, 1964, 114 p. dactylographiées, 13 fig., XXVIII planches.

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- Yerkes (R. W.). Microwear analysis of microdrills from feature 17 on the Fingerhut tract of the Cahokia sites (11-S-34/7) 1998.

 

 Référence bibliographique :

PAUC P., avec la collaboration de BOHIC D., FAURE Ph. 2004 :

Brève typologie de l'outillage lithique inhérent à la fabrication de parures protohistoriques en coquillages et les sources de matières. Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, t. CIV, p. 69-76.

 

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15 décembre 2009 2 15 /12 /décembre /2009 18:20

NOUVELLES DONNEES SUR LES SITES-ATELIERS

DE FABRICATION DE PARURES DES CORBIERES

 

Paulette Pauc

 

Depuis plus d'une décennie je me suis particulièrement investie dans l'étude technologique des rondelles d'enfilage réalisées en test de Cerastoderma glaucum (Poiret 1789) [1], mais attachée aussi à reproduire leur chaîne opératoire classique et moins conventionnelle d'après le mobilier archéologique retrouvé. Je rappelle que l'expérimentation a exigé l'utilisation de matières premières similaires à celles des artisans protohistoriques quant aux coquillages et à l'outillage lithique reconnu en milieu terrestre, sans toutefois négliger les données provenant de contextes lacustre ou aride [2].

 

La chaîne opératoire est en partie complétée par la découverte, en 2002, de deux polissoirs fragmentés, en grès fin siliceux, à gorge(s) en U rectiligne et incurvées, sur le site de Saint-Cristol III à Fontjoncouse (Figure 1). Bien que partiellement incomplets, ils sont comparables à l'exemplaire du site-atelier de La Font-des-Pigeons à Châteauneuf-les-Martigues, daté du Néolithique ancien, qui possède quatre gorges en U [3]. Leur taille réduite ainsi que le nombre de gorges ne permet d'effectuer qu'un calibrage individuel par frottement dans le but d'obtenir une tranche plate. Ces outils lithiques, de couleur lie-de-vin, ont été tirés des grès du Crétacé « Turono- » Sénonien de la Pinède de Durban-Corbières [4].

L'attribution chronoculturelle de l'ensemble des sites-ateliers des Corbières se situe très amplement entre le Néolithique final-Chalcolithique et le Bronze ancien. Mais la découverte sur le site du Pesquié IIa et IIb d'éléments caractéristiques du Néolithique moyen, lato sensu, comme des    fragments de bracelets, obtenus à partir de valves de Glycymeris évidées, de 6,4 mm, 4,4 mm, et 7,1 mm d'épaisseur pour la partie la plus forte, un fragment distal de valve de 4,9 mm d'épaisseur, ainsi que deux armatures de flèche à tranchant transversal du type 10 Ea de J. Vaquer[5],  confirme l'occupation du lieu à cette période.

La confection des bracelets implique la suppression de la partie centrale de la valve par abrasion sur une plaque de grès et le polissage de la bordure interne au moyen d'un morceau de grès cylindrique qui aurait pris, à l'usage, une pseudo-forme de sablier [6].

 

Les sites de Douzens, évoqués par P. Barthès, ne sont pas sur le lieu-dit Robert, mais de Bubas I - II (Barthès, 2002, figure 5, n° 2 & 3) et La Serre de l'Agre (tessons n°1 & 4) [7].  Les tessons font partie de découvertes (B. et P. Pauc) postérieures aux prospections de l'auteur. Les intempéries de novembre 1999 ont très fortement lessivé le sol et fait apparaître une importante quantité de mobilier céramique attribuable au Vérazien ; le fleuron en était le bord d'un récipient orné de deux languettes, de préhension, couplées (n°4). A séparer de l'ensemble vérazien : un tesson cardial décoré par l'application de la bordure distale d'un Cerastoderma glaucum de petite taille, témoin d'une présence humaine au Néolithique ancien (Figure 2). L'attribution chronoculturelle de ce petit tesson m'avait été confirmée par Jean Guilaine, en fin d'année 2000, et ses collaborateurs du Centre d'Anthropologie de Toulouse, dans le cadre de mes études à L'EHESS.

 

Pour conclure cette note, je rappelle ce que j'avais écrit en 1997 et qui est toujours d'actualité : Les Corbières n'ont pas approvisionné en rondelles d'enfilage les autres régions. Autrement-dit elles n'ont pas fourni les départements limitrophes et au-delà pour la simple et bonne raison que les sites de production n'y ont pas encore été découverts. Les sites-ateliers des Corbières ne m'ont pas livré les milliers de mèches à forer qui auraient pu servir à perforer les milliers de rondelles en test retrouvées dans l'ensemble des milieux sépulcraux du Midi de la France, en écartant le site-atelier de la Font-des-Pigeons, à Châteauneuf-les-Martigues, daté du Néolithique ancien. D'autre part, je ne peux me baser sur la production des ateliers audois pour comparer le diamètre des rondelles réalisées sur place avec le même type de produit des autres régions, afin d'en établir la relation. Les sites-ateliers n'ont donné, jusqu'à présent, qu'une très faible quantité de rondelles entières très bien calibrées et de taille variable ; il m'est donc difficile d'entreprendre le même travail comparatif qu'effectuèrent Hélène Barge, pour du mobilier trouvé en milieu sépulcral (Languedoc-Provence), et Luc Laporte, pour l'atelier de Ponthezières, sur L'Ile d'Oléron, qui lui a procuré un très grand nombre d'éléments de parure en cours et achevés et surtout des milliers de perçoirs [8].

Les directives de recherches sur les sites-ateliers de l'Aude n'engagent que moi et sont issues de problématiques personnelles qui cadrent au mieux avec la réalité des découvertes.

 

Figure 1 : a) polissoir à 2 gorges, en U, curvilignes

                 b) polissoir à 1 gorge, en U, rectiligne

 

Figure 2 : tesson cardial (La Serre de l'Agre, Douzens)

 

 

 

 

 

 



[1] Ce taxon appartient à l'espèce méditerranéenne alors que Cardium edule est l'équivalent sur la façade atlantique, selon la nomenclature en vigueur.

MIENIS (H. K.) : Nomenclature in archaeological reports dealing with material from the Middle East, J. Ridout-Sharpe (dir.), The Malaco+Archaeology Group Newsletter, issue number 2, april 2002. j.ridout-sharpe@cabi.org, p. 1-2.

[2] PAUC (P.), REINHARD (J.) : Protohistoric shell bead manufacture and the problem of string suspension : recent studies in northwestern Mediterranean region. J. Ridout-Sharpe (dir.), The Malaco+Archaeology Group Newsletter, issue number 2, april 2002. j.ridout-sharpe@cabi.org, p. 2-5.

PAUC (P.) : Reproduction de perles circulaires réalisées en test de Cerastoderma edule, Journées d'Archéologie Expérimentale du Parc de Beynac (Dordogne, F.) 1996-1997, Ch. Chevillot (dir.), Bilan n° 1, 1997, p. 7-66.

PAUC (P.) : Parures et ébauches de La Draga : prémices d'un atelier, El poblat lacustre neolític de La Draga, A. Bosch i Lloret, J. Chinchilla Sánchez, J. Tarrús i Galter, Monografies del CASC 2, Girona, 2000a , p. 225-228.

PAUC (P.) : Activité de fabrication protohistorique de parures en coquillages marins. Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, CC, 2000b, p. 23-28.

PAUC (P.) : La production de parures en coquillages marins, dans l'Aude (F.), entre le Néolithique final et le Bronze ancien. XX Col.loqui International d'Arqueologia de Puigcerdà 2000, à paraître.

[3] COURTIN (J.) : Les premiers paysans du Midi. Histoire de la France préhistorique de -6000 à -4500, La Maison des Roches Éd., 2000, 128 p.

[4] BARROUQUERE (G.), BARRUSSEAU (J.-P.), BESSIERES (G.), DEMANGES (M.), DURAND DELGA (M.), FREYTET (P.), GADEL (F.), GOT (H.), GUITARD (G.), JAFFREZO (M.), PLAZIAT (J.-C.), ROUX (L.), TAMBAREAU (Y.), VIALLARD (M.-P.), VILATE (J.) : Guides Géologiques Régionaux, Pyrénées-Orientales Corbières (coord. M. Jaffrezo), Masson Éd., 1977, 191 p.

 

[5] VAQUER (J.) : Le Néolithique en Languedoc Occidental, Éd. du CNRS, 1990, 398 p. et 7 planches.

[6] Par exemple le petit polissoir en grès de l'atelier de fabrication de bracelets en schiste de Bruxières-les-Mines (Allier) ; dans GOURY (G.) : Précis d'Archéologie Préhistorique. L'Homme des Cités lacustres, Éd. A. Picard, Paris, 1932, 778 p. et XL planches.

[7] BARTHES (P.) : L'occupation néolithique et protohistorique en basse vallée de l'Aude apports de trois campagnes de prospection entre 1991 et 1993. Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, tome CII, 2002, p. 23-32.

[8] BARGE-MAHIEU (H.) : 2.2 Fiche coquillages néolithiques, Camps-Fabrer H. (dir.). Fiches typologiques de l'industrie osseuse préhistorique, Néolithique Âge des métaux. Cahier IV : objets de parure, 1991, 17 p.

LAPORTE L. : Parures et centres de production dans le Centre-Ouest de la France au Néolithique final. Thèse de doctorat sous la direction de Mme M. Lichardus, Univ. de Paris I-Panthéon/Sorbonne UFR 03, Histoire de l'Art et Archéologie, 1994, 2 volumes.

 

 

Référence biblio

PAUC P. 2003 : Nouvelles données sur les sites-ateliers de fabrications de parures des Corbières. Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, Tome CIII, Notes d'Archéologie, p. 159-160, 2 figs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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15 décembre 2009 2 15 /12 /décembre /2009 18:03

LE COLLIER DE LA DAME DE CHAMBLANDES (CH)

 

LA MODE AU 5e MILLENAIRE AVANT JESUS-CHRIST :
LE COLLIER DE LA TOMBE 1 DE PULLY-CHAMBLANDES

 

Paulette Pauc: Recherches & Développement Culturel en Corbières, 11220 Coustouge (France) ; EHESS Toulouse (France)

Patrick Moinat : MHAVD Lausanne (CH – Suisse)

Jacques Reinhard : Service archéologique de Neuchâtel (CH-Suisse) ; Galerie-Atelier O'Local Estavayer-le-Lac (CH-Suisse).

 

1. Historique

 

Des travaux effectués en 1943 ont permis à Louis Bosset de découvrir des niveaux préhistoriques et des sépultures. Une des deux cistes contenait un sujet inhumé avec un riche ensemble de parures situé au niveau du cou. L'étude anthropologique réalisée par M.-R. Sauter puis les différentes méthodes d'analyses anthropologiques montrent, malgré les difficultés réelles de diagnose, qu'il s'agit d'un sujet féminin d'environ trente ans (Pittard et Sauter 1945-1946).

Outre le collier, présenté selon divers agencements suivant les auteurs (fig. 1), d'autres éléments en coquillages faisaient probablement partie d'un second ensemble.

Patrick Moinat a repris l'étude de la nécropole de Pully-Chamblandes (Moinat, 1998). La révision de la parure a permis de réaliser la reproduction des éléments qui composent le collier pour une exposition à la Galerie-Atelier O'Local d'Estavayer-le-Lac (CH) sous la direction de Jacques Reinhard en 2003 et de mettre parallèlement sur CD-ROM l'étude et la démarche expérimentale dans un but didactique. Les éléments du collier ont été présentés en 2004 à l'occasion de l'exposition “Histoire de Perles” dans la même galerie.

 

2. Étude et démarche expérimentale

 

La détermination des matières premières une fois discutée et mise au point entre les cosignataires de cette étude a débouché sur une recherche de matières similaires dans le but d'effectuer plusieurs exemplaires de chacun des éléments. La démarche expérimentale s'est faite sur une année au fur et à mesure de l'acquisition des différentes ressources. C'est le bon sens qui nous a guidés en l'absence d'éléments de comparaison avec d'authentiques stades opérationnels ainsi qu'un outillage lithique techniquement mis en relation directe.

 

2.1 Composition du collier

 

Le collier est composé de 20 pendeloques en forme de hache façonnées dans du marbre blanc, de 41 rondelles d'enfilage en marbre blanc, de 39 perles cylindriques en marbre blanc, de 3 perles cylindriques en lignite (bois fossile brun-noir), de 12 perles tubulaires obtenues à partir de tronçons de coquille blanche de vermets et de 7 grains d’enfilage globulaires ou sub-sphériques en akène de Lithospermum (matière minérale blanche).

 

2.1.1 Pendeloques en marbre en forme de hache

 

Les pendeloques en forme de hache représentent un type de parure bien déterminé (Gallay 1977). Le site d’Egolzwil 3 a livré des pendeloques en marbre (Wyss, 1994). Barge-Mahieu et Bordreuil ont inclus les modèles de la tombe 1 de Chamblandes dans leur typologie, alors que cette forme spéciale ne peut rentrer dans la catégorie des “perles à ailettes” : terme générique qui englobe dans leur étude des formes très éloignées de l’élément type (Barge-Mahieu et Bordreuil, 1990-1991).

 

2.1.1.1 Technique de fabrication

 

La taille réduite des pendeloques (de 10 mm maximum à 7 mm minimum de haut) nous a conduits à rechercher des gravillons de marbre adaptés à la taille et la forme définitive, de façon à avoir le moins possible de matière première à enlever.

Les premiers essais ont été tentés à partir de petits galets de marbre centimétriques, tout à fait quelconque, recueillis dans des dépôts de plage en bordure de rivière, dans l’Aude et les Pyrénées-Orientales (Sud de la France où l’opération s’est déroulée). Très vite le choix s’est porté sur des formes dans lesquelles on pressentait l’objet terminé (fig. 2).

La forme naturelle la plus adéquate rend le travail moins fastidieux. La taille réduite de l’objet brut écourte le temps de réalisation mais implique de s’adapter à la création d’objets miniatures. Pour fabriquer des éléments aussi réduits de taille, il est fortement conseiller d’utiliser un outillage techniquement approprié. L’on tente tout d’abord de se servir du matériel habituellement utilisé pour la reproduction de parure (Pauc 1997). Le volume et le poids des outils seront systématiquement proportionnés afin d’éviter la multiplication des échecs.

La casse de l’appendice de suspension a été occasionnée accidentellement au cours de la perforation (à cause d’un perforateur inadapté) ou bien malencontreusement lors d’une chute sur le carrelage (conséquence malheureuse qui ne rentre pas dans le cadre de l’expérimentation à proprement parler).

Le protocole se limite à l’emploi de marbre d’après les connaissances du moment, alors que le grès et le silex ne peuvent absolument pas y échapper.

 Une pierre de grès très fin parallélépipédique, de taille décimétrique, va servir pour créer successivement les épaulements sur le gravillon de marbre roulé puis abraser les parois et les contours. Un micro-perforateur en silex emmanché dans une tige de viorne sera extrêmement efficace pour pratiquer le trou de suspension transversalement au montant de l’appendice, sans heurter au passage l’épaulement de la pendeloque. Ces étapes successives nécessitent 7 heures de travail au début puis 5 heures dès que l’on a acquis les gestes automatiques. Cela demande une grande patience mais également beaucoup de concentration et de dextérité (planche 1,  planche 2).

 

2.1.2 Rondelles d'enfilage en marbre

 

Le site d’Egolzwil 3 a également livré des rondelles d’enfilage en marbre (Wyss, 1994).  La difficulté majeure a été de calibrer le pourtour à cause du faible diamètre des pièces.

Le même outillage a servi et les gestes se sont adaptés. Toutes proportions gardées, sauf la taille des mains de l’opérateur qui sont malheureusement disproportionnées par rapport au reste. Tout est à manier avec précaution. Le bout des doigts subit autant que l’élément les conséquences de l‘abrasion ; aucune protection intermédiaire n’est possible du fait de la démesure.

 

2.1.2.1 Technique de fabrication

 

La réalisation débute, après avoir choisi un gravillon rond et d’une épaisseur adaptée, par l’abrasion des faces afin d’obtenir une pièce au profil rectiligne. S’ensuit la perforation au centre de la pièce en maintenant l’objet du bout des doigts. Le calibrage a été fait en frottant le pourtour  sur la pierre de grès mouillée (planche 3, planche 4). 

 

2.1.3 Perles cylindriques en marbre

 

L’on rencontre plus de difficultés pour  faire un petit cylindre au profil régulier que pour façonner la rondelle d’enfilage. Les cônes de perforations doivent être impérativement les plus réduits possible afin de conserver suffisamment d’épaisseur au cylindre. 

 

2.1.3.1 Technique de fabrication

 

Nous avons procédé de même que pour la réalisation de la rondelle d’enfilage sauf que le gravillon rond a gardé plus d’épaisseur. La perforation nécessite plus de temps et plus de pointes en silex. Cela dit le silex employé vient de Dordogne (F) ; c’est du silex de la région de Bergerac qui est extrêmement efficace. Deux micro-pointes viennent à bout d’une perforation sans problème. Le calibrage est moins réussi du fait que l’élément est difficile à maintenir au bout des doigts et une fois de plus les blessures ne cessent d’apparaître (planche 5).

 

2.1.4 Perles cylindriques en lignite

 

Nous nous sommes fiés aux quelques pièces en cours de fabrication qui figurent dans la thèse de J. Ll. Pascual Benito pour reproduire des perles cylindriques avec encore plus de difficultés étant donné que la matière est très fragile (Pascual  Benito, 1998). Cette dernière se délite très facilement  d’où l’intérêt de bien choisir les morceaux de lignite. L’exploitation du lignite est attestée sur la bordure est de l’Espagne au Néolithique. Les gisements sont localisés dans l’environnement des sites archéologiques qui ont livré de la parure. Du lignite provenant d’extractions pourrait être plus résistant qu’une matière récupérée en surface dans une région moins favorisée par le climat hivernal. Notre démarche expérimentale a donné de moins bons résultats que pour les perles cylindriques en marbre.

 

2.1.4.1 Technique de fabrication

 

Des morceaux de lignite compacts, sans fissures, brun sombre mat, ont été choisis pour reproduire quelques perles cylindriques. Il faut casser net le fragment d’une épaisseur adaptée à la longueur de la perle, l’abraser pour lui donner une forme sub-circulaire puis le perforer au centre en limitant au maximum le diamètre du cône de perforation de façon à garder suffisamment de matière. Le calibrage est délicat, la diminution de l’épaisseur tend à provoquer des séparations au niveau des clivages naturels (planche 6).

 

2.1.5 Perles tubulaires en vermets

 

Les perles tubulaires en coquille de vermet ne sont pas très répandues dans la littérature. A Khirokitia (Chypre), le site de Cap Andreas-Kastros (6e millénaire av. notre ère) a livré des restes de Vermetidæ, de Vermetus sp. et plus précisément de la variété Vermetus triquetrus (Cataliotti-Valdina, 1994). Un tronçon de Dendropoma sp. est apparu sur le site néolithique de Medo Tojeiro à Beja, au Portugal (Moreno Nuño R., 1995). Un élément d’enfilage tubulaire a été trouvé dans le département de l’Hérault (Sud de la France) ; quelques éléments associés à des coquilles de Dentalium sexangulum de même diamètre ont été mis au jour sur un site solutréen, dans la région de Girona en Catalogne espagnole (Pauc, 1997).

En Suisse, des éléments appartenant visiblement à des vermétidés ont été publiés comme étant des serpules (Borrello, 2003). Cette remarque a été relatée dans une note sur les parures en coquillage de Suisse (Pauc et coll. 2004).

 

2.1.5.1 Technique de fabrication

 

Cet élément d’enfilage tubulaire ne requiert pas d’effort particulier étant donné que les segments sont obtenus par cassure nette puis régularisés aux extrémités sur la pierre de grès par frottements légers (planche 7).

 

2.1.6 Grains d’enfilage globulaires ou sub-sphériques en akènes de Lithospermum

 

Le Lithospermum purpureocaeruleum L. (Grémil pourpre-bleu) est une plante de la famille des Borraginacées de 60 cm de haut maximum (Rameau et al.,1989). Il a la particularité de faire des fleurs disposées en grappes, au printemps, qui font place graduellement à des akènes dont la coque ovoïde en calcaire blanc est remplie d’une matière organique tendre. La taille des akènes varie de 2 à 3,5 mm de long. Les plus gros sont utilisés pour faire des grains d’enfilage. La récolte peut débuter en fin d’été sur des tiges encore vertes alors que les akènes sont devenus blancs ou beiges très clair. A l’automne les feuilles et les tiges sèches progressivement mais gardent leurs akènes. Les tiges brunes squelettiques, toujours munies de leurs graines blanches, passent l’hiver, la saison suivante et même la période estivale ; grâce à cela on peut facilement les distinguer parmi la végétation verdoyante tout en côtoyant les nouvelles plantes de l’année. L’association phytosociologique allie la plante à la chênaie pubescente, à des fourrés thermophiles et des lisières forestières.

En Suisse, la tombe 2 du site de Saint-Léonard « les Bâtiments », dans le Valais, a livré une centaine de perles. Il s’agit d’une inhumation de trois sujets, un homme et une femme jeunes accompagnés d’un enfant de 14 à 15 mois. Plus de 80 perles ont pu être positionnées, elles se situaient principalement au niveau des coxaux des deux adultes. Suivant les auteurs, il est très probable que ces perles appartenaient plus à un vêtement ou à une ceinture, plutôt qu’à un collier (Corboud 1986 ; Corboud et al. 1988). Les perles de cette tombe sont dans le musée de Sion. La reproduction a été réalisée au départ en nous appuyant sur cette parure ainsi que sur le collier de la sépulture chalcolithique de Lorca (province de Murcia en Espagne) (Ayala-Juan, 1987), c’est à dire en pratiquant une ouverture au niveau des pointes. Une composition d’akènes de Lithospermum agencés sur un fragment de tissu découvert dans le lac de Morat (canton de Fribourg, CH) puis décrite schématiquement à l’aide d’un dessin par E. Vogt en 1937 et reprise par H. Schlichtherle en 1988, montre une double perforation ventrale qui donne à la graine la forme de petit bouton à bélière.

 

2.1.6.1 Technique de fabrication

 

Après avoir ôté le pédoncule, on saisit l’akène du bout des doigts, le plus fermement possible, puis on frotte la partie sommitale avec un tout petit polissoir en grès très fin jusqu’à pratiquer une ouverture suffisamment grande pour faire passer le lien de suspension. On procède de la même sorte pour le pôle opposé. On nettoie l’intérieur en enlevant la matière organique à l’aide d’une fine écharde sans briser la coquille. Une fois l’akène vidé de son contenu, on obtient un grain d’enfilage. (planche 7). 

 

2.1.7 Éléments reconstitués

 

Généralement, peu d’éléments de parure ont été menés complètement à terme par manque de temps à consacrer à la réalisation. Le projet initial était de refaire le collier complet. Nous avons surmonté bien des difficultés en refaisant quelques exemplaires de chaque type (planche 9). Le travail d’apprentissage a maintes fois été abordé ; celui des enfants en particulier (Pauc, 2000 et 2002).

 

3. Conclusion

 

Nous nous sommes tournés vers le milieu naturel en utilisant des tiges de Viburnum lantana L. (Viorne lantane) (plante de la famille des caprifoliacées dont l’association phytosociologique s’allie avec la chênaie pubescente (Rameau et al. 1988) dans le même biotope que le Lithospermum) très pratiques pour emmancher les micro-perforateurs (fig. 3), soit en insérant la pointe dans une fente transversale à l’extrémité du petit bâton ou bien en enfonçant directement la pointe dans la moelle au cœur de la tige. Ces outils ont été très faciles de maniement.

Les micro-perforateurs ont été spécialement réalisés pour  pratiquer des petits trous dans des matières délicates. Une micro-pointe en silex, datée de 3600 ans av. notre ère, semblable à nos exemplaires figure dans l’ouvrage consacré  aux lacs de Chalain et de Clairvaux (Pétrequin 1988).

Le fait que le diamètre des tronçons de vermets correspondent aux diamètres des autres éléments du collier laisse penser que ces derniers ont été spécialement adaptés car il est plus facile de créer des modèles et de choisir des akènes à la taille voulue que de se fournir en coquillages marins.

Le lien de suspension du collier pouvait être réaliser en fibre de lin d’un millimètre de diamètre mais probablement aussi à partir de très fines lanières en liber de tilleul (Reinhard, 2001).

Un Conus mediterraneus, une Columbella rustica et quatre fragments de Charonia nodifera munis d’une ou de deux perforations ont été mis à part. Nous ne disposons d’aucune information pour caler ces éléments ornementaux sur la défunte. 

La collecte des coquillages marins provient peut-être d’une même source d’approvisionnement. Par exemple, un paléorivage quaternaire Corse du Eutyrrhénien, Saint Florent, livre 38 espèces et variétés de coquilles de mollusques marins, dont Conus mediterraneus Brug., Columbella rustica L., Vermetus trinqueter Bir. et Tritonalia edwardsi Payr. (Ottmann, 1958) pour ne citer qu’eux. La liste énoncée par Ottmann correspond à la thanatocénose d’une malacofaune issue de différents faciès marins. Ce type de dépôt existe probablement partout ailleurs en Méditerranée, notamment entre le delta du Rhône et les côtes italiennes. Les échanges avec les populations du littoral perdurent depuis les contacts établis au cours du Paléolithique. Cette sorte de “commerce néolithique” compris comme un colportage organisé (Sauter, 1963) aurait permis d’acquérir des parures exotiques destinées à des personnages importants. Le choix judicieux du diamètre des tubes de vermets parfaitement en accord avec celui des autres éléments confère à l’ensemble un aspect délicat et précieux (Pauc et coll. 2004), quelque soit l’agencement  proposé. Ce collier présente la particularité d’être composé de pendeloques de tailles sensiblement différentes dont la répartition a pu faire l’effet d’un bijou d’une exceptionnelle qualité esthétique, pourquoi pas d’un atout de séduction. Sa valeur tient au choix de la finesse des matières premières et au temps passé à sa réalisation. Pour les raisons qui viennent d’être évoquées, il ne saurait être question de le qualifier de “colifichet ou d’objet de pacotille ou même clinquant”. Cette remarque a été faite à propos de parures en coquillage d’aspect bien plus modeste que celle-ci (Pauc 2002).

 

Bibliographie

 

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Pétrequin A.-M., Pétrequin P. 1988 : Le Néolithique des Lacs. Préhistoire des Lacs de Chalain et de Clairvaux (4000-2000 av. J.-C.), Éd. Errance, collections des Hespérides, 1-287.

 

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Référence biblio :

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6 décembre 2009 7 06 /12 /décembre /2009 10:07
Conception expérimentale de la pendeloque à ailettes globulaires à partir d’une typologie évolutive

 

Résumé

Le poster, exposé lors de l’hommage à Georges Costantini, résume, sur un premier panneau, les travaux de reproduction des pendeloques à ailettes globulaires, complétés par un élément de parure, plus abouti, doté d’appendices sphériques détachés. Le second panneau regroupe des modèles de l’Aveyron, de la Lozère et de l’Aude, accompagnés de quelques exemplaires espagnols et suisses ainsi qu’un fac-similé en calcite. Il s’agrémente d’une scène picturale imaginative qui s’oppose à la création artisanale actuelle. Il se termine par la liste des références bibliographiques d’où sont tirées les illustrations. 

Abstract

The poster was presented during the homage meeting to Gorges Costantini. The first panel summarizes the process of reproduction of pendants with rounded wings, together with a component of a more elaborated jewel with spherical appendix standing out. The second panel brings together examples from Aveyron, Lozère and Aude, with some others from Spain and Switzerland, as well as a facsimile in calcite. An imaginary scene exemplifies the making of a jewel, but it shows inconsistencies with our current knowledge. A list of references, from which the figures are taken from, ends the posters.

 

Resumen

En el póster, expuesto durante el homenaje a Georges Costantini, se resumen en un primer panel los trabajos de reproducción de los colgantes con aletas globulares, completados por un elemento más acabado dotado de apéndices esféricos destacados. El secundo panel recoge unos modelos de Aveyron, de Lozère y Aude, a los que acompañan algunos ejemplares encontrados en España y Suiza, así como un facsímil de calcita. Se complementa con una escena pictórica imaginativa que contrasta con la producción artesana actual. Finaliza con la bibliografía de donde se han obtenido las ilustraciones.

 

INTRODUCTION

 

L’idée de proposer un poster sur la conception expérimentale de la pendeloque à ailettes globulaires m’a semblé inéluctable, dans le cadre de l’hommage à Georges Costantini. Cette présentation succède à un travail de description (Pauc et al. 2005) partiellement utilisé pour la construction du premier panneau. La typologie évolutive aboutit au modèle le plus complexe en mettant en œuvre des techniques tout à fait plausibles. La seconde partie est consacrée aux parures typiquement caussenardes (Costantini, 1990 ; Simanjuntak, 1998), en relation avec les éléments du Narbonnais parmi lesquels se dégage le don conceptuel le plus évolué (Héléna, 1924,1925a, 1925b, 1937 ; Guilaine, 1976-1977).

Quelques modèles espagnols réunissent un exemple de base et d’autres beaucoup plus créatifs (Pascual Benito, 1998). Les exemplaires suisses montrent une certaine performance conceptrice (Ramseyer, 1995). L’œuvre de Zdenek Burian, intitulée « La fabrication des colliers » offre une scène de la vie quotidienne à Dolni Vestonice, en Moravie, au Paléolithique supérieur (Lagardère, 1990). L’expérimentation, par contre, permet d’exploiter des techniques et fournit ainsi des reproductions très proches de la réalité.

CONCEPTION

 

La reproduction de pendeloques suisses, en forme de hache, d’Egolzwil 3 et de Pully-Chamblandes, datées de la fin du 5e millénaire av. J.-C. (Wyss, 1994 ; Pauc et al., 2004), précède la création de pendeloques à ailettes (Pauc et al., 2005). Les éléments de parure spatuliformes, anciens, s’éloignent de la typologie de Barge et Bordreuil (1990-1991). Cette forme simple est comparable à l’élément non perforé de la grotte de Sargel à Saint-Rome de Cernon (Aveyron) (fig. 1), aux 3 pendeloques de la grotte des Trois Ours à Seynes (Gard) et à l’élément non perforé de la grotte de la Roquette à Conqueyrac (Gard) (Barge, 1982).

 

 La matière des pendeloques à ailettes du Narbonnais a plus fréquemment été déterminée comme de « L’albâtre calcaire », très rarement du marbre ou, plus simplement, de « l’albâtre » (Héléna, 1924, 1925a, 1925b, 1937 ; Guilaine, 1976-1977). Il s’agit vraisemblablement d’un calcaire métamorphique car l’albâtre, dans le cas qui nous occupe, s’entend au sens des tailleurs de pierre (marbriers) et non au sens minéralogique qui le définit comme une variété de gypse (sulfate hydraté), d’une faible dureté - 2 : rayable à l’ongle - (Foucault et Raoult, 2003). La meilleure façon de différencier ces deux matières est de faire un test à l’acide.

La majorité des reproductions a été réalisée en calcaire métamorphique ou marbre, et occasionnellement en calcite.

Les perforateurs ont été adaptés à la taille réduite des appendices de suspension des pendeloques en forme de hache et des pendeloques à ailettes. C’est la présence de microlithes, à Clairvaux, au Néolithique (Pétrequin et Pétrequin 1988) qui, au départ, a servi de référence. Les perforateurs ont été confectionnés, à partir d’éclats de silex. Les formes les plus caractéristiques sont les suivantes : pointe fusiforme, pointe à pédoncule dégagée par un épaulement unilatéral, pointe à pédoncule dégagée par un épaulement bilatéral. Leur taille a peu varié.

A la fin du 5e millénaire av. J.-C., on trouve des « Dickenbännli » (perçoirs), parmi lesquels on retiendra les microlithes complets (de 1 cm à 0,9 cm de long), associés à des éléments de parures en calcaire et en coquillage (Schlichtherle 1990). Ces parallèles archéologiques dévoilent l’utilisation de microlithes adaptés à la perforation de perles tubulaires dont les dimensions minimales atteignent 6 mm de long et 3 mm de diamètre.

L’évolution typologique des pendeloques à « ailettes » part d’une forme initiale naturelle, brute, passe à une préforme de base à épaulements bilatéraux, évolue différemment vers un modèle plus ou moins élaboré à ailettes étirées horizontalement, relevées ou retombantes, ou bien développant des appendices latéraux bilobés puis transformés en appendices bilatéraux globuleux (Pauc et al. 2005). La métamorphose de la pendeloque se poursuit en créant des appendices bilatéraux sphériques détachés.

DU GRAVILLON A LA FORME

 

L’idée créatrice naît dans le gravillon de calcaire métamorphique ou de calcite. Au premier coup d’œil on imagine la forme que l’on pourra en tirer (fig. 2).

A l’aide d’un petit polissoir anguleux en grès, fortement cimenté, on creuse les épaulements par frottement pour dégager l’appendice de suspension (fig. 3, fig. 4).

On fait de même pour la séparation, plus ou moins prononcée, des appendices bilatéraux qui présentent les formes les plus diverses suivant la configuration initiale du gravillon, de l’angle du polissoir et de l’exécution de l’artisan.

 

TECHNIQUE DE PERFORATION UTILISÉE

 

La petite taille de l’élément de parure, la finesse de la matière et l’épaisseur de l’appendice rendent délicat l’exercice de perforation. L’industrie lithique utilisée est tirée de petits éclats de silex retouchés (fig. 5, fig. 6). Le perforateur est coincé à l’extrémité d’une tige en bois fendue, par commodité. La main manipule le petit manche avec beaucoup de légèreté tout en étant très efficace (fig. 7). La partie active de l’outil taraude, d’une part, progressivement la matière. A mi-parcours, ou au-delà, cette opération est reprise sur la face opposée en veillant à ce que le cône de perforation soit bien centré. Effectuer cette dernière tâche sur un appendice de suspension particulièrement étroit exige d’être bien concentré, afin de conserver suffisamment de matière autour de la lumière pour assurer sa fonctionnalité. Cette phase peut se dérouler avant ou après la séparation des lobes.

FAÇONNAGE DES GLOBULES

 

L’élément de parure est disponible tel quel (fig. 8), mais l’idée créatrice poursuit son chemin. Le geste machinal pour modifier les appendices bilatéraux est le suivant : les globules sont formés par rotation alternée de leur extrémité sur une plaque de grès tendre, à composante limono-sableuse micacée (fig. 9). Cette action permet de passer d’une ailette anguleuse à une ailette globuleuse en formant une cupule dans la pierre. Les globules sont de taille différente ou, de façon plus améliorée, de même gabarit.

Une ultime étape expérimentale atteint le degré de perfection lorsque les globules de taille analogue, les plus arrondis possible, ont l’apparence de sphères détachées. Cette configuration singulière est obtenue en creusant, avec le tranchant d’un éclat de silex, une gorge à la base de chacune des boules (fig.10, fig. 11).

La confection de ces pendeloques requiert quelques qualités : un bon potentiel de création, une certaine habileté, de l’attention, de la patience, de la persévérance ainsi qu’une excellente acuité visuelle de près.

 

REPRODUCTIONS

 

 De nouveaux cas de figure fournissent les informations suivantes :

·        La figure 12 présente l’évolution à partir d’un gravillon ovale pris dans le sens horizontal (1), la préforme avec un appendice sommital légèrement dégagé et la séparation des appendices bilatéraux peu marquée (2), un premier perforateur utilisé (3a-b-c), un second perforateur utilisé (4a-b-c), un troisième perforateur utilisé pour calibrer la lumière (5a-b), la pendeloque avec l’extrémité des appendices bilatéraux légèrement arrondis (6).

 

·        La figure 13 présente l’évolution à partir d’un gravillon triangulaire (1), la préforme avec un appendice sommital dégagé (2), l’étape suivante avec la séparation des appendices bilatéraux peu marquée (3), puis la séparation des appendices bilatéraux accentuée (4), un premier perforateur cassé en cours d’utilisation (5), un second perforateur utilisé (6), la pendeloque avec l’extrémité des appendices bilatéraux arrondis (7).

 

·        La figure 14 présente l’évolution à partir d’un gravillon ovale pris dans le sens vertical (1), la préforme avec un appendice sommital dégagé (2), l’étape suivante avec la séparation des appendices bilatéraux nettement marquée (3), un premier perforateur utilisé (4a-b), un second perforateur utilisé (5a-b-c), un troisième perforateur utilisé pour calibrer la lumière (6a-b), la pendeloque avec l’extrémité des appendices bilatéraux arrondis (7).

 

La plaque expérimentale en grès tendre a servi à modifier, de façon plus ou moins notable, les appendices bilatéraux des quatre éléments de parure (fig. 15).

LES MODÈLES

 

L’ensemble des modèles caussenards (Costantini, 1990 ; Simanjuntak, 1998) comprend des stades de création allant du modèle de base, le plus simple, au modèle à ailettes globulaires de même taille. Les ailettes pointues étirées ne se cantonnent pas au Causse ; le modèle s’infiltre jusqu’aux grottes de la région de Narbonne (Héléna, 1924, 1925a, 1925b, 1937 ; Guilaine, 1976-1977).

Le fait n’est pas isolé dans ces grottes sépulcrales puisque l’on y trouve, entre autre, des parures en jayet, des armatures de flèches en sapin à bord crénelé, des palettes en schiste et le rituel de trépanation plus spécifique au Causse. Il s’agit très probablement d’une zone de contact et d’échanges entre le littoral et l’arrière pays, notamment pour les coquillages servant à la fabrication de parure, et plus particulièrement les rondelles d’enfilage en test de Cerastoderma glaucum dont l’activité de fabrication est bien représentée dans les Corbières (Pauc, 2000).

 

CONCLUSION : DE L’IMAGINATION A LA CRÉATION

La scène imaginée par Zdenek Burian, en 1958, sur « La fabrication des colliers » met au premier plan un homme du Paléolithique supérieur qui exhibe, entre ses mains, un collier de pendeloques à ailettes en ivoire de mammouth (Sauter, 1944), sous le regard de ses proches (Lagardère,1990, p. 43, n° 27). L’artiste représente l’outillage, disposé sur un établi, parmi lequel on distingue très nettement l’instrument principal : une pointe emmanchée. Ce domaine artistique ne saurait être comparé aux travaux expérimentaux incontournables. Dix années d’expérience dans la reproduction de parures les plus diverses m’ont familiarisée avec les matières et les instruments. Les pendeloques munies d’appendices bilatéraux sphériques détachés ont été confectionnées quasi spontanément. Ce serait laborieux de produire les mêmes objets en sculptant des boules avec un éclat de grès, ou un éclat de silex. Cette manière d’opérer me semble incertaine étant donné la petite taille des globules et leur parfaite régularité dans le meilleur des cas.

 

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

 

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Remerciements

 Le poster a été réalisé avec à la participation de M. Sylvain Quertelet (Musée de Préhistoire de Solutré) pour l’illustration du tableau de Z. Burian, de M. Jean Vaquer (Centre d’Anthropologie de Toulouse) et Melle Hélène Vergély (EHESS-Toulouse) pour les clichés des colliers exposés dans les musées de Millau et de Rodez, avec l’accord de M. François Leyge et Mme Annie Philippon. Les deux panneaux ont été déposés au Service éducatif du Musée de Millau.

MM. Lionel Cavin et Josep LLuis Pascual Benito se sont chargés de la mise en forme des résumés.

Le cliché de la préforme de la Grotte de Sargel m’a aimablement été fourni par M. Jean-Pierre Serres.

Je dois à M. Patrick Moinat l’apport essentiel de parallèles pour le petit outillage lithique.

Cette note a été soumise à révision à MM. Jacques Coularou et Jean Gascó (Centre d’Anthropologie, Toulouse).

J’adresse mes plus sincères remerciements à toutes ces personnes.

Référence biblio :

PAUC P. 2006 : Conception expérimentale de la pendeloque à ailettes globulaires à partir d’une typologie évolutive. Hommes et Passé des Causses, Colloque de Millau 2005 Hommage à Georges Costantini, Textes réunis par Jean Gascó, François Leyge et Philippe Gruat. Centre d’Anthropologie – Millau,  Archives d’Ecologie Préhistorique Toulouse, p. 315-321.

 

 

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6 décembre 2009 7 06 /12 /décembre /2009 09:56

PROBLEMATIQUES DES SYSTEMES D’ENFILAGE DES COQUILLES DE COLUMBELLA RUSTICA ET DE TRIVIA EUROPEA 

 

Paulette Pauc, Alexandre Pauc 

 

Résumé

 

Cette note aborde les problèmes rencontrés au niveau des systèmes d’enfilage des coquilles de Columbella rustica et de Trivia europea en archéologie. Les expérimentations n’ont pu s’appliquer que sur des coquillages actuels.

 

Introduction

 

Les systèmes d’enfilage des coquilles de Columbella rustica et Trivia europea sont expliqués, habituellement, à partir de théories mises en applications au moyen de dessins.

Le canton du Valais, en Suisse, détient le record du nombre de coquilles de Columbella rustica enfilées seules ou associées à des tests de Glycymeris roulés par l’action marine, en colliers « reconstitués ». Les colombelles déposées dans le Musée cantonal de Sion proviennent des sépultures de Sion, Grimisuat et Ayent ; l’autre part se trouve dans le Musée National Suisse (communication personnelle de Philippe Curdy, conservateur du musée de Sion). Généralement les chercheurs s’accordent à dire que la voie du Rhône est l’axe de circulation des coquillages méditerranéens ; Sauter, notamment, dans son « aspect du commerce néolithique » (Sauter, 1963, p. 53). L’analyse de Combier propose que la diffusion se soit faite par des circuits plus complexes, qui ne sont pas négligeables, particulièrement pour l’Autriche, la Hongrie et la Roumanie (Combier, 1974, p. 53). Dès le Mésolithique, on trouve la présence de Columbella rustica dans un camp de chasseurs-pêcheurs, en Châblais valaisan, à une douzaine de km du Lac Léman, en bordure de la plaine alluviale du Rhône (Pignat, 2002, p. 167).

 

Une des vitrines du musée de Sion contient, notamment, deux colliers constitués suivant deux modes d’enfilage. Ces assemblages procurent divers états de conservation des coquilles (Pauc et coll., 2004, p. 1-2) parmi lesquels on note une usure naturelle du test avec une absence de l’apex et/ou, de manière progressive, des premiers tours de spires, mais également des attaques de micro-organismes marins. L’ensemble inédit, de près de 200 spécimens enfilés à l’opposé de l’ouverture naturelle, provenant d’Ayent (Fig. 1, 2, 3, 4) et un second assortiment composé de spécimens enfilés dans le sens axial de la coquille et régulièrement raccourcis jusqu’à l’avant dernier tour de spire, entièrement ou partiellement conservé, ou bien jusqu’à la partie globuleuse du dernier tour, intercalés de tests roulés ont retenu notre attention (Fig. 5). Les photos ont été réalisées en 2002, dans la vitrine, grâce à l’amabilité de Philippe Curdy et au concours de Jacques Reinhard.

Dans les collections du Musée National Suisse sont déposés 7 colliers inédits, provenant de Riddes, en Valais, qui totalisent environ 500 Colombelles (communication personnelle de Samuel van Willigen, conservateur du département Préhistoire au Schweizerisches Landesmuseum de Zürich). L’utilisation massive, en milieu sépulcral, est attribuable au Bronze ancien selon les archéologues. 

 

Parmi les Columbella rustica de la Cueva de Nerja à Malaga, en Espagne, Jorda Pardo recense le mode d’enfilage dans le sens axial dans la couche XIII de l’Épipaléolithique (2 exemplaires), dans la couche XI-VII du Néolithique ancien (3 exemplaires) et dans la couche IV du Néolithique final (3 exemplaires), mais également à l’opposé de l’ouverture, en nombre inférieur, dans ces mêmes couches. Le mode d’enfilage à l’opposé de l’ouverture naturelle est uniquement représenté dans la couche VI-V du Néolithique moyen (Jorda-Pardo, 1982, p. 91). 

 

Les Coquilles de Trivia europea principalement utilisées au Paléolithique sont aussi employées à la fin du Néolithique. La double perforation sur le dos, à chaque extrémité du grand axe, est la plus répandue (Taborin, 1974, p. 365 ; Ladier et Welté, 1995, p. 89). Plus rarement, une double perforation, de part et d’autre du petit axe, a été inventoriée (Taborin, 1974, p. 334 ; Laporte, 1994, p. 79 et fig. 2.19). Dans tous les cas le système d’enfilage est conditionné par la morphologie interne du coquillage.

 

Les collectes de coquillages ont été réalisées par les auteurs, sur la côte rocheuse de la plage du Môle, au Cap d’Agde dans l’Hérault (Languedoc-Roussillon). Les conditions de ramassages des coquilles de Columbella et de Trivia  sont difficiles, sur la portion de plage jonchée d’énormes quantités de coquilles entières et fragmentées (Fig. 6, 7, 8, 9).

 

Columbella rustica

 

Columbella rustica est un coquillage qui apparaît sur les côtes méditerranéennes et, sur la façade atlantique, du Portugal jusqu’aux Canaries, aux Açores et en Guinée, selon Jorda Pardo (d’après Nordsieck 1968) (Jorda Pardo, 1982, p. 94). Ce taxon est représenté dans le rivage Eutyrrhénien, du Quaternaire moyen de Corse (Ottmann, 195, p. 103), des Alpes-Maritimes et de Monaco (Iavorsky, 1965, p. 152 ; Bonifay et al., 1958, p. 108 ). Le petit recensement de dépôts actuels, sur la plage d’une côte rocheuse, a été initié par Cartonnet (Carqueiranne, Var) (Cartonnet, 1991, p. 299), suivi par Mendoza (Les Aresquiers, Hérault) (Mendoza, 2002, p. 44) et de nos recherches récentes (Cap d’Agde, Hérault).

 

Expérimentation

 

Cinquante coquilles de Columbella rustica, entières et fragmentées, ont été ramassées, au cours de cinq collectes, de 5 à 6 heures chacune, à la vue, par les auteurs, sur une portion de 150 m de la plage du Môle sur la côte rocheuse du Cap d’Agde, dans l’Hérault, en Languedoc-Roussillon. Leur état confirme les degrés de conservation constatés par Cartonnet sur près de 400 individus entiers et fragmentés, récoltés en 6 heures, à la vue, sur  500 m de plage, à Carqueiranne dans le Var, en Provence (Cartonnet, 1991, p. 299). Nos exemplaires sont comparables à la typologie de Cartonnet en y ajoutant les conditions de préservation de la paroi des coquilles ainsi que diverses fractures dues à l’action marine. Dans le pire des cas inventoriés, le test a subi de sérieuses attaques de micro-organismes marins en creusant de microscopiques alvéoles circulaires, qui se rejoignent entre elles, en offrant ainsi une paroi « rongée » sur l’ensemble de la coquille. Les altérations, occasionnées aux coquilles, favorisent plus rapidement leur destruction lors des chocs provoqués par l’action marine sur un substrat rocheux dans la mer ou caillouteux sur le rivage.

Mendoza signale que ses collectes de coquillages effectuées pendant plusieurs dizaines d’années ne lui ont fourni qu’une dizaine d’exemplaires de Columbella rustica sur la zone des Aresquiers (Mendoza, 2002, p. 44 et communication personnelle de l’auteur), entre Sète et Palavas-les-Flots ; cette faible quantité recueillie serait due à sa très grande rareté sur cette partie du littoral héraultais et expliquerait son absence dans le site chasséen de Lattes. La côte rocheuse, d’origine volcanique, au Cap d’Agde est située à une vingtaine de km au sud des Aresquiers. La côte du Languedoc-Roussillon offre d’autres zones rocheuses sur lesquelles on ne rencontre pas actuellement les coquillages qui font l’objet de cette étude. Dans l’Aude, par exemple, les grottes de La Clape fournissent les deux taxons, sans que l’on puisse en trouver sur la frange littorale rocheuse qui borde ce massif. La quarantaine de Colombelles du dolmen de Saint-Eugène à Laure-Minervois (Sicard, 1930, carton n° 7 et p. 218) pourraient, dans ce cas, provenir des circuits d’échanges.    

 

Les coquilles actuelles, en règle générale, montrent leur couleur d’origine. Celle-ci tire sur des touches de brun, de roux ou de gris sur fond blanc, mais présente également un jaune uniforme. Occasionnellement, l’usure superficielle ôte partiellement la couche pigmentée du test. Plus rarement, la couleur naturelle s’estompe sur les endroits exposés aux U-V en prenant une teinte blanchâtre.

 

Pour démarrer l’expérimentation le choix s’est porté sur les coquilles qui présentent une configuration propre au modèle de parure désiré, pour limiter les risques d’échecs.

 

La première expérimentation (planche 1) concerne la perforation à l’opposé de l’ouverture d’une coquille en excellent état de conservation (1). La paroi, d’une épaisseur normale, très dure, ne peut être trouée en pression. Il est nécessaire de pratiquer une abrasion superficielle, bien localisée du test,  au moyen d’un petit polissoir en grès (2, 3) et de poursuivre l’abrasion jusqu’à l’apparition d’un minuscule trou au centre (4). Le profil de la pièce montre le creusement du test (5). L’amincissement de la paroi permet la perforation avec une pointe en silex (6) pour calibrer la lumière au diamètre désiré (7). L’élément de parure est ainsi disponible (8).

 

L’unique exemple de double perforation d’une Colombelle, sur le dernier tour de spire, à l’opposé de l’ouverture naturelle, par usure sur une meule, est signalé par Courtin (2000, p. 83).

L’expérimentation s’est déroulée sur un spécimen dont le labre a été brisé par l’action marine (Planche 2 : 1). La double perforation  offre deux possibilités d’enfilage :

·        le lien de suspension, ou d’attache, pénètre par l’ouverture naturelle, sort par le trou situé dans le prolongement (2), entre ensuite dans le second trou et ressort par l’ouverture naturelle (3)

·        le lien de suspension passe uniquement à travers les deux trous exécutés côte à côte (4)

 

 

On peut aussi se servir d’une coquille, successivement altérée par les micro-organismes marins et usée par l’action marine, qui présente une fenêtre irrégulière sur la partie bombée de la dernière spire (Fig. 10). Ceci permet d’observer la columelle et d’apprécier l’épaisseur du déploiement des volutes. Ces dernières se développent en spirale autour de la colonne centrale, à chaque tour de spire, jusqu’à la paroi du coquillage. Ce genre d’élément de parure obtenu à moindre effort, sinon sa collecte, montrera une usure plus significative, lors du port prolongé, par rapport à une coquille d’excellente qualité.

 

Une perforation circulaire produite par un lithophage, sur la partie latérale gauche du dernier tour de spire (Planche 3 : 1) peut servir pour y glisser le lien de suspension, ou d’attache ; faire ressortir ce dernier, par l’ouverture naturelle, oblige à l’extraire avec un instrument, comme une fine pointe en bois, par exemple. Ce type d’enfilage permet deux positions du lien:

·        horizontale, pour une présentation verticale du coquillage (2)

·        inclinée, pour une présentation oblique du coquillage (3)

 

Les expérimentations suivantes concernent les éléments enfilés dans le sens axial, qui bénéficient d’une intervention spécifique.

Cette action volontaire est destinée à supprimer la columelle à l’intérieur de la partie globuleuse pour favoriser le passage du lien jusqu’à l’ouverture naturelle ; sans cette opération l’enfilage est impossible. Cartonnet remarque que la columelle occupe tout l’espace en interdisant le passage du fil (Cartonnet, 1991, p. 300). Josep Lluis Pascual Benito, spécialiste de la parure sur la Péninsule Ibérique, confirme, au cours d’un entretien, qu’il est nécessaire de briser la columelle. Les dégâts occasionnés par l’action marine ne peuvent en aucun cas supprimer chaque déploiement de la columelle à l’intérieur du coquillage sans abîmer la paroi de ce dernier.

 

La première intervention (planche 4) s’est déroulée sur un spécimen endommagé au niveau des premiers tours de spire sur lequel apparaît le début de la columelle. L’action de perforation avec une pointe en silex par rotation n’a pas été praticable. Il a fallu exercer une perforation en pression avec la pointe en silex sur le développement de la volute qui se présente (1). Le résultat est satisfaisant puisqu’il casse la très fine matière déployée (2). On poursuit l’opération de perforation en pression, en enfonçant plus profondément la pointe en silex, dans l’orifice amorcé, verticalement (3, 4). Cela brise partiellement la paroi de l’avant dernière spire et une nouvelle partie de la columelle (5, 6). Le renouvellement de l’opération en pression montre un trou net dans la volute suivante (7). Une dernière pression avec la pointe en silex casse la dernière volute en laissant passer la clarté venant de l’ouverture naturelle (8). La pièce obtenue est comparable aux parures protohistoriques (9). Pour montrer l’intérieur de la dernière spire, on a ouvert une fenêtre en brisant volontairement la paroi d’une fine épaisseur, en pression avec la pointe en silex, au niveau des trois petits trous existants (10, 11, 12, 13, 14, 15, 16). Cette action supplétive n’a que l'intérêt de voir le passage du lien de suspension au niveau de la bordure interne de la coquille (17).

 

On a directement enchaîné l’intervention suivante, avec des gestes beaucoup plus spontanés (planche 5). La coquille présente le même degré d’usure que la précédente (1). Le début de perforation de la columelle, en pression avec la pointe, donne le résultat escompté (2). On renouvelle l’opération avec la pointe en silex (3) qui traverse très précisément le test de la volute suivante (4). Pour terminer, on enfonce profondément la pointe à la verticale, vers la dernière volute, pour libérer le passage en direction de l’ouverture naturelle (5, 6). Le lien de suspension s’introduit sans aucune difficulté (7).

 

Conclusion

 

Ce travail complète les observations faites par Cartonnet sur les coquilles de Columbella rustica collectées sur la plage du Var et les spécimens archéologiques publiés (Cartonnet, 1991). Cette nouvelle recherche démontre, de façon concrète, que « l’altération » des parures en coquillages, déposées dans les musées, ne puisse mettre directement en cause les moyens de conservation de ces derniers comme le dénonçait Borrello (2003, p. 174-175) pour les Institutions suisses. Nous avons déjà évoqué cette accusation abusive, dans une note, à propos des parures du Néolithique de Suisse (Pauc et coll., 2004, p.1-2). Il faut tenir compte de l’état des coquillages au moment de leur collecte sur une plage. Un test plus ou moins dégradé est le résultat d’une usure progressive et/ou de dommages causés par l’action marine, et/ou d’attaques par les micro-organismes marins lithophages, ou inversement (Fig. 11 a-b et 12 a-b).

 

On peut échafauder un scénario en évoquant les pires conditions suivantes : supposons que la collecte des coquillages se soit déroulée dans un dépôt coquillier fossile du Quaternaire moyen, à divers degrés de dissolution (pulvérulents dans le pire des cas) en y ajoutant un port prolongé des parures, puis que ces dernières aient subi une nouvelle déposition dans le milieu humique d’une sépulture primaire, où le cadavre libère l’acide phosphorique au moment de sa décomposition, qu’en plus la sépulture ait été édifiée dans un sol naturel acide, enfin, qu’après prélèvement lors d’une fouille, les ornements aient été entreposés dans un dépôt mal conditionné. Les coquillages, qui ont traversé des millénaires, voire, lorsque ce sont des fossiles anciens, des millions d’années avant de devenir des éléments de parures qui arrivent jusqu’à nous, sont plus à l’abri dans un musée normalement conditionné que dans le milieu où ils ont été prélevés. Comment expliquer, sinon, que toutes les pièces malacologiques conservées dans les musées ne soient pas atteintes par la « maladie de Byne » à laquelle Borello fait référence ? Seuls les coquillages récupérés dès la fouille dans un état pulvérulent, donc très dégradés, nécessitent un traitement particulier (Borello, 2003, p. 173-174).  

La fouille de la grotte de la Falaise a livré à Héléna (1925, p. 213) deux pendeloques en test de Glycymeris dont l’une est  parfaitement conservée, avec un reste partiel de nacre, « comme neuve » souligne-t-il, contrairement à l’autre qu’il considère « rongée par l’action dissolvante des eaux d’infiltration chargées d’acide carbonique ». Il s’agit très probablement de deux tests collectés en l’état et perforés pour obtenir des éléments de parure.

La fouille du dolmen de Saint-Eugène, débutée en 1924, a procuré une quarantaine de Colombelles à Sicard (1930, carton n° 7 et p. 218). Ces éléments étaient enfilés dans le sens axial et certains conservent partiellement l’avant dernier tour de spire. L’unique cliché ne permet d’examiner qu’une face des éléments parmi lesquels on remarque deux spécimens avec une fenêtre, sur la dernière spire, qui laisse entrevoir la columelle et un troisième exemplaire qui présente un trou à gauche de l’ouverture naturelle.

Divers degrés de conservation des coquillages ont été constatés dans le niveau Eutyrrhénien du département de l’Aude (Sud de la France) et dans le cadre de l’étude menée depuis une quinzaine d’années sur les éléments de parures en coquillages, en cours de fabrication et achevés, issus des ateliers de fabrication des Corbières, ainsi que des parures provenant de dolmens.

 

Columbella rustica est bien représentée dans l’abri de Strette à Barbaghju, en Corse, au Néolithique ancien cardial comme le rappellent Bonato et ses collaborateurs (Bonato et al., 1997-1999, p. 108-109). Le site est localisé « sur une falaise de molasses miocènes en bordure du fleuve “A Strutta”, dans un petit défilé reliant le golfe de Saint Florent à la plaine de Poggio-d’Oletta » selon Costa (Costa, 2004, p. 176). Le golfe de Saint Florent dispose de « beaux gisements de Quaternaire marin, dont l’un est situé sur le flanc est du golf, à 200 m au N du ruisseau de Ficajolo selon Ottmann (d’après Hollande 1875) (Ottmann, 1958, p.102). Le niveau quaternaire repose sur des molasses miocènes, au pied des collines, en formant un replat cultivé en vignes. Sans être en mesure d’affiner les informations précédentes, on apprend par Ottmann que le gisement quaternaire marin de Saint Florent a livré 38 espèces de coquillages, correspondant à une accumulation de spécimens vivant sur un fond sableux ou rocheux, dont, entre autre, Columbella rustica (Ottmann, 1958, p.102 et 103).   

  

Trivia europea

 

Les coquilles de Trivia sont présentes sur la côte Atlantique et la façade méditerranéenne ;  une variété fossile existe  dans les faluns de Touraine, selon Taborin (1974, p. 122, 123).

Ce coquillage a bénéficié d’une double perforation située, généralement, à chaque extrémité du grand axe (Taborin, 1974, p. 365 ; Ladier et Welté, 1995, p. 89 ) et, moins souvent, de part et d’autre du petit axe (Taborin, 1974, p. 334 ; Laporte, 1994, p. 79 et fig. 2.19). 

Sur les cinq collectes, quatre ont fourni treize spécimens entiers de Trivia europea et un modèle fragmenté. La taille réduite des coquilles ne permet pas de les distinguer aisément dans l’abondant dépôt coquillier du Cap d’Agde.

Expérimentation

 

L’essai de perforation par pression avec une pointe en silex n’a pas fonctionné. La surface ornée de minuscules côtes transversales empêche l’adhérence de l’outil. En pratiquant une abrasion du test, jusqu’à l’apparition d’un petit trou, on peut alors effectuer l’orifice par rotation de l’extrémité d’une pointe en silex jusqu’à la lumière souhaitée.

La Trivia en partie brisée, par l’action marine, au niveau de l’ouverture permet d’observer la configuration interne du coquillage (Fig. 13).   

 

Les perforations, à chaque extrémité du grand axe (Planche 6), nécessitent une abrasion locale (1, 2) jusqu’à l’apparition de la lumière (3), en renouvelant l’opération à l’opposé (4, 5). On régularise la perforation à l’aide de la pointe en silex par rotation sur les deux petits trous (6, 7, 8, 9). La pointe en silex a traversé la paroi de la dernière spire mais a également entamé chaque extrémité de la columelle qui se trouve à l’intérieur (10, 11). Le lien de suspension, ou d’attache, passe librement par les deux orifices (12, 13, 14). Si la coquille est intacte au niveau de l’ouverture naturelle, exiguë, il est impossible d’attacher chaque extrémité, séparément, en faisant passer un lien à partir de la perforation circulaire vers l’ouverture naturelle ou vice-versa.

 

Deux exemples archéologiques pour lesquels ce serait faisable ont retenu notre attention. Le premier est illustré par une coquille de Trivia dont la face dorsale est usée jusqu’à la base des côtes et une seconde, normalement conservée, provenant de l’Abri Plantade (département du Tarn-et-Garonne, en Midi-Pyrénées) attribué à la culture magdalénienne, sur lesquelles les orifices circulaires laissent passer, pleinement pour l’une et plus discrètement pour l’autre, la lumière à partir de la face ventrale (Ladier et Welté, 1994, p. 89 et 90). Ce phénomène est forcément dû à l’élargissement de l’ouverture naturelle que l’on pense anthropique, à moins qu’une fracture d’origine érosive n’ait élargi le passage ; une représentation de l’agrandissement que les magdaléniens auraient pu imiter volontairement  pour copier la nature. L’exemple suivant touche les cinq coquilles de Trivia, du site de Ponthezières (Ile d’Oléron en Charentes-Maritimes) daté du Néolithique final, qui auraient bénéficiées « d’un travail préparatoire ayant consisté à découper une ouverture par incision sur chacune des faces latérales de la coquille puis, dans un second temps, une régularisation, par abrasion, des lèvres de l’ouverture » selon Laporte, qui  souligne ensuite que « la lumière de la perforation est le plus souvent ovale et qu’aucune trace de lien de suspension n’a été observée à la binoculaire » (Laporte, 1994, p. 79). Cette explication  mériterait quelques éclaircissements de la part de l’auteur.  

Les perforations expérimentales effectuées sur Trivia, de part et d’autre du petit axe  (Planche 7 : 1), ont aussi été réalisées par abrasion  (2, 3) puis rotation de la pointe en silex (4) sans que l’action de percement n’atteigne la columelle sous-jacente. Le lien passe par ces orifices sans le moindre problème (5). L’élargissement volontaire de l’ouverture naturelle n’a pas été pratiqué sur le spécimen étant donné qu’il était destiné à devenir un grain d’enfilage et non un élément de décor à fixer sur un support de type vestimentaire.

 

Parallèlement aux spécimens de nos collectes, nous avons eu l’opportunité de nous procurer des coquilles de Trivia provenant de Mauritanie, en Afrique, qui sont de couleur rose, quelquefois rose virant au gris ou entièrement grises, plus rarement blanche. Les tests sont parfois usés sur la face dorsale et/ou légèrement usés ou troués au niveau de l’ombilic sommital, zone d’attache de la columelle, par l’action marine et par les micro-organismes marins (Fig. 14).

 

Une perforation d’origine érosive est localisée sur l’emplacement T2 de Taborin (Taborin, 1993, p. 263) sur un des exemplaires (Fig. 15).

 

L'exiguïté de l’ouverture naturelle ne permet pas au lien de suspension, utilisé pour le collier en cours d’agencement, de passer. Un fil de lin plus fin est utilisé pour effectuer un enfilage secondaire en pendeloque sur le collier.

Dans le lot des coquilles de Trivia africaines, deux spécimens de grande taille avaient été retenus pour refaire le mode d’attache hypothétique de l’assemblage couplé de chaque partie plate, proposé par Taborin (Taborin, 1993, p. 263). La double perforation latérale a été réussie sur un seul spécimen en utilisant le protocole précédent. L’autre intervention, débutée par une abrasion superficielle pour amincir le test jusqu’à l’apparition de la lumière, s’est soldée par un échec, lorsque la pointe en silex enfoncée en pression dans le test a provoqué l’éclatement du coquillage (Fig. 16).  

 

La fracture du second coquillage n’a pas permis de procéder à la reconstitution du double mode d’agencement proposé par Taborin. Seule l’application 3 parmi les hypothèses de Taborin a été retenue  (Taborin 1993, p. 263) :

·        le lien entre par l’ouverture naturelle, sort à l’extérieur par un orifice, longe la bordure du test, rentre dans le second orifice et ressort par l’ouverture naturelle (Planche 8 : 1, 2, 3).

Conclusion

 

On constate que le travail de perforation de ces coquillages au test côtelé, d’apparence fragile, réclame en fait une préparation préalable. La volonté d’exécuter une percussion directe n’est pas opérationnelle sur des coquillages d’une taille aussi réduite, comme le montre notre échec. Le sens « percussion directe » pourrait être attribué, non pas à une action anthropique mais plutôt à l’action marine lors de chocs sur les rochers.

Ces expérimentations apportent une vision plus réaliste que les dessins effectués par Tosello à partir des instructions de Taborin, notamment pour l’espace exagérément élargi de l’ouverture naturelle (Taborin, 1993, p. 263), en réalité très exiguë et orientée latéralement comme le montrent les photos 15, planche 6, et  3, planche 8, ainsi que sa largeur vue de l’intérieur, sur la figure 17.  

 

N.B.

 

Les éléments de parures reproduits (Fig. 17) ont été ajoutés sur un second collier expérimental dont les résultats seront publiés ultérieurement et comparés avec les observations faites sur le premier collier porté au quotidien.

L’activité expérimentale oblige à multiplier les domaines de recherches et les conclusions qui en découlent apportent quelques réponses non négligeables.   

Que cette publication rassure les chercheurs et les pousse à compléter leurs descriptions en toute objectivité !

Bibliographie

 

Bonato M., Lorenzi F., Nonza A., Radi G., Tozzi C., Weiss M. C., Zamagni B. 1997-1999 : Le nuove ricerche a Pianosa, gli scavi del 1998. Les premiers peuplements holocènes de l'aire corso-toscane / Il primo popolamento olocenico dell'area corso-toscana, C. Tozzi, M. C. Weiss (dir.), Université de Corse, Università di Pisa, Unione Europea Asse 4.2 - Cultura Uomo Societ, Ed. ETS, 91-115.

 

Bonifay E., Iavorsky G., Mars P. 1958 : Nouvelles coupes dans les terrains quaternaires de Monaco et ses environs. Bulletin du Musée d’Anthropologie Préhistorique de Monaco, n° 5, 85-118.

 

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Cartonnet M. 1991: Réflexion sur la conservation différentielle des coquilles de colombelles utilisées comme parures préhistoriques. Revue archéologique de l'Est et du Centre Est, Tome 42, fasc. 1, Éd. du CNRS, 299-304.

 

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Costa L. J. 2004 : Corse préhistorique. Peuplement d’une île et modes de vie des sociétés insulaires (IXe-IIe millénaires av. J.-C.). éditions errance, 1-192.

 

Courtin J. 2000 : Les premiers paysans du Midi. Histoire de la France préhistorique de -6000 à -4500, La Maison des Roches Éd., 1-128.

 

Héléna Ph. 1925 : Matériaux pour servir à l'étude de la Préhistoire du pays narbonnais - Les grottes sépulcrales des Monges à Narbonne (suite et fin). Bulletin de la Commission Archéologique de Narbonne, t. XVI, 2e partie,193-240, planches 8-12.

 

Iavorsky G. 1965 : Problèmes posés par trois gîtes quaternaires à Nice et à Monaco. Bulletin du Musée d’Anthropologie Préhistorique de Monaco, n° 12, 135-171.

 

Jorda Pardo J. F. 1982 : La malacofauna de la cueva de Nerja (II) : los elementos ornamentales. Zephyrus  XXXIV-XXXV, 89-98.

 

Ladier E., Welté A.-C. 1994 : Bijoux de la Préhistoire, tome I : La parure magdalénienne dans la vallée de l’Aveyron. Catalogue de l’exposition du Musée d’Histoire Naturelle de Montauban. 1-191.

 

Mendoza A. 2002 : Les coquillages du site chasséen de Lattes. Archéologie en Languedoc n° 26, 39-44.

 

Ottmann F. 1958 : Les formations Pliocènes et Quaternaires sur le littoral corse. Mémoires de  la Société Géologique de France (nouvelles séries), mémoire n° 84, 1-176 et 5 planches.

 

Pauc P. avec la collaboration de Ph. Curdy, P. Moinat, J. Reinhard 2004 : Comments on some elements of shell jewellery from prehistoric Switzerland. Archeo+Malacology Group Newsletter, J. Ridout-Sharpe (coord), issue n° 6, september 2004, 1-2.

 

Pignat G. 2002 : L'abri de Châble-Croix, un camp de chasse et de pêche en plaine du Rhône, in Premiers hommes dans les Alpes de 50 000 à 5000 avant Jésus-Christ. Catalogue de l'exposition de Sion 2002, 164-169.

 

Sauter M.-R. 1963 : Sur un aspect du commerce néolithique. In : Mélanges d'histoire économiques et sociale en hommage au Professeur Antony Babel, Genève : Impr. de la Tribune, 47-60.

 

Sicard G. 1930 : L'Allée couverte de Saint-Eugène.    Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, Tome XXXIV, 195-224.

 

Taborin Y. 1974 : La parure en coquillage de l'Epipaléolithique au Bronze ancien en France, Gallia Préhistoire, t. 17, fasc. 1, p.101-179 et fasc.2, 307-417.

 

Taborin Y. 1993

 : Traces de façonnage et d’usage sur les coquillages perforés. Traces et fonction : les gestes retrouvés, Vol. 50, Colloque international de Liège, Éd. ERAUL, 255-267.

Référence bibliographique :

PAUC P., PAUC A. 2006 :

Problématiques des systèmes d’enfilage des coquilles de Columbella rustica et Trivia europea. R. Tichy (SEA) & R. Paardekooper (EXARC) directeurs, euroREA 3, Society for Experimental Archaeology Hradec Králové, Czech Republic and EXARC, p. 25-30.

 

 

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27 novembre 2009 5 27 /11 /novembre /2009 11:43
Présence de micro-gastéropodes et de characées inclus
dans les accidents siliceux des calcaires laguno-lacustres oligocènes de Portel-des-Corbières (Aude).
 

Paulette PAUC*, Philippe FAURÉ**, Didier BOHIC*

 

Nos remerciements à Jean Le Lœuff

 pour nous avoir permis de faire les photos à la loupe binoculaire

du Musée des Dinosaures d’Espéraza (Aude).

 

 

 

L'effondrement du fossé de Narbonne-Sigean est contemporain de la première phase de distension qui suit, à l’Oligocène, la surrection de la Chaîne pyrénéenne. Il permet, sous l’effet d’une forte subsidence, le dépôt d’un épais complexe sédimentaire argilo-carbonaté dont la datation repose sur les malacofaunes selon Louis Doncieux, (1903) et sur les micromammifères selon Jean-Pierre Aguilar (1977) et dont l’âge s'échelonne de l’Oligocène supérieur (étage Chattien) à la partie basale du Miocène (étage Aquitanien). Il  s'agit de dépôts non marins d’ambiance tout d'abord lagunaire et évaporitique (marnes et lits de gypse), puis de sédiments plus nettement carbonatés, alternativement lacustres et palustres, dans lesquels des accidents siliceux ont été signalés. Les gastéropodes (planorbes, limnées, hydrobies) y sont assez fréquents, sous forme de moules externes ou de fossiles pourvus de leur test.

La présence de fossiles inclus dans des cristaux de gypse est plus singulière. Elle est signalée pour la première fois, au début des années vingt, à La Plâtrière de Portel-des-Corbières par Joseph Durand, puis décrite par Gaston Astre en 1925 qui identifie les gastéropodes Potamides lamarcki, Hydrobia dubuissoni, d’autres Hydrobiidæ, attribués à des Bithynies (« Bithynia durandi » et « B. gypsorum »), appartenant au genre Pseudamnicola, ainsi que des gyrogonites de characées (« Chara costulata »). La présence des foraminifères Rosalina douvillei et Quinqueloculina reicheli y est plus tard signalée par Christianne Rosset  en 1966.

 

La présence de tels fossiles inclus dans du silex n’avait, à ce jour, jamais été signalée dans les Corbières.  Une « bouillie de Characées » avait, seule, été reconnue auparavant par Robert Simmonet en 1985 dans son inventaire du silex récolté dans les environs de Sigean.

 

Une telle faune, incluse dans les silex, a particulièrement pu être observée au Pré d’Audène (environs de Portel-des-Corbières), localité où les accidents siliceux se placent dans des calcaires blancs, un peu crayeux, de type lacustre.

 

- Les gastéropodes : Malgré leur petite taille (3 mm maximum), leur excellent état permet de reconnaître Hydrobia cf. dubuissoni BOUILLET (fig. 3 et ? 4)(forme plus allongée que la forme moyenne de H. dubuissoni) (3 mm) et des sections de Pseudamnicola  (fig. 1 et 2) (2,5 mm). Les micro-gastéropodes sont habituellement présents dans la matière siliceuse où ils montrent diverses conditions de conservation : pourvus de leur test, bien visible en section (fig. 1 et 2), leur moule externe, dégagé, à la surface du cortex siliceux (fig. 3) ou en moule externe rempli de silice cristallisée (fig. 4).

 

- Les charophytes  (« Chara  costulata ») : Ils sont présents à la surface du cortex siliceux sous forme de fragments de tiges à section crénelée et d’oogones isolées (0,7 mm de long) (fig. 5). Dans la matrice siliceuse, il s’agit surtout de bioclastes très fragmentés (observations x 100, avec la participation d'André Morala, Musée des Eyzies de Tayac, Dordogne).

 

Des observations analogues sont faites par Fernand Touraine en 1966 dans l’Oligocène de Montmeyan et des bassins tertiaires du Haut-Var où, entre les grès à Potamides et les calcaires à « Bithynia » - à considérer comme des Hydrobies -, certains bancs sont affectés par une meuliérisation (rappelant la meulière du bassin parisien) dans lesquels subsistent aussi des Characées et des cavités formées par les moules externes de gastéropodes dissous.

 

La présence de micro-gastéropodes et de characées dans la matière siliceuse est suffisamment exceptionnelle pour que le silex de l’Oligocène de Portel-des-Corbières soit parfaitement reconnaissable et identifiable.

Il a été recueilli au Pech-Narbonnais, à Peyriac-de-Mer, sous forme de cassons, sur une station de plein air, attribuable à la culture vérazienne, de même que sur le site-atelier principal du Pesquié IIa et IIb à Saint-Laurent-de-La-Cabrerisse.

Son utilisation est aussi confirmée à Fontjoncouse où deux perforateurs (fig. 6a et 7a) en silex patiné contenant des micro-gastéropodes (fig. 6b et fig. 7b) sont identifiés dans un site-atelier secondaire du plateau de La Blaque. Ce petit outillage lithique y est lié à la chaîne opératoire de la fabrication de parures en coquillages marins.

 

Jusque-là, la présence de characées dans le silex n’était qu’un simple indice d’identification. Désormais, l’origine de cette matière siliceuse peut-être caractérisée grâce à la description des éléments biologiques qui la composent.

 

*Recherches et Développement Culturel en Corbières – 11220 Coustouge - F.

**Laboratoire des Mécanismes de Transfert en Géologie, Université Paul Sabatier, 14 Av. Edouard Belin, 31400, Toulouse cedex – F.

 

Jean-Pierre Aguilar, Données nouvelles sur l’âge des formations lacustres des bassins de Narbonne-Sigean et de Leucate (Aude) à l’aide des micromammifères, Géobios n°10, fascicule n°4, 1977, pp. 643-645.

 

Gaston Astre, La faune stampienne incluse dans les cristaux de gypse de Portel. Bulletin de la Société d’Études Scientifiques de l’Aude, tome XXIX, 1925, pp. 118-134.

 

Louis Doncieux, Monographie géologique et paléontologique des Corbières orientales. Annales de l’Université de Lyon, nouvelle série, I. Sciences, Médecine, fascicule 11, 1903, 404 p., 69 fig., 7 pl. HT, 1 carte.                               

 

Joseph Durand, Sur les coquilles fossiles en inclusions dans les cristaux de gypse limpide de l’Oligocène de Narbonne. Bulletin de la Société d’Études Scientifiques de l’Aude, tome XXII, 1923a, pp. 55-56.

 

Joseph Durand, Sur des cristaux de gypse à fossiles inclus et l’origine des pétroles. Bulletin de la Société d’Études Scientifiques de l’Aude, tome XXII, 1923b, pp. 60-62.

 

Paulette Pauc, Activité de fabrication protohistorique de parures en coquillages marins. Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, tome CC, 2000, pp. 23-28, 3 fig.

 

Paulette Pauc (avec la collaboration de Didier Bohic et Philippe Fauré), Brève typologie de l'outillage lithique inhérent à la fabrication de parures protohistoriques en coquillages et les sources de matières. Bulletin de la Société d'Études Scientifiques de l'Aude, 2004, tome CIV, pp. 69-76, 4 fig.

 

André Rivière et Solange Vernhet, Oligocène de Bages-Sigean (Aude), C.R. Académie des Sciences de Paris, tome 274, 1972a, Série D, pp. 1251-1254.

 

André Rivière et Solange Vernhet, Oligocène des environs de Peyriac (Aude, feuille de Narbonne), C.R. Académie des Sciences de Paris, tome 274, Série D, 1972b, pp. 2744-2747.

 

Christiane Rosset, Les formations du bassin Oligocène de Sigean-Portel et leur chronologie, C.R. sommaire des séances de la Société Géologique de France, 1964, pp. 416-417.

 

Christiane Rosset, Foraminifères inclus dans le gypse oligocène de Portel (Aude) : extraction et conséquences paléogéographiques., C.R. sommaire des séances de la Société Géologique de France, 1966, pp. 48-49.

 

Robert Simmonet, Le silex du Magdalénien final de la grotte des Églises dans le Bassin de Tarascon-sur-Ariège. Préhistoire ariégeoise, tome XXXX, 1985, pp. 71-97, 8 fig.

 

Fernand Touraine, Découvertes de l’Oligocène à Montmeyan et dans les bassins tertiaires du Var. C.R. sommaire des séances de la Société Géologique de France, 1966,  pp. 66-68.


Note parue dans :

PAUC P., FAURE P., BOHIC D.  2006 :   

Présence de micro-organismes dans les accidents siliceux des calcaires oligocènes de Portel-des-Corbières. Etudes Roussillonnaises, t. XXII , éditions Trabucaïr., p. 229-232.

 

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23 novembre 2009 1 23 /11 /novembre /2009 11:35

 

 

CHARONIA lampas lampas L. : DU COQUILLAGE A L’INSTRUMENT SONORE

 

Paulette Pauc* et Jean-Marie Strangi**                                        

 

Résumé :

L’expérimentation montre qu’il est possible d’utiliser directement un Charonia lampas lampas endommagé par l’action marine, au niveau des premières spires, comme instrument sonore. L’irrégularité de la bordure nécessiterait une égalisation par abrasion et éventuellement une perforation de la columelle. La transformation d’un spécimen complet, par  raccourcissement au niveau des premières spires à l’aide d’une lame en silex puis d’une perforation de la columelle avec une pointe en silex est également plausible.

 

INTRODUCTION

 

Le Charonia lampas lampas Linné 1758, syn. C. nodifera Lamarck 1822, dont le nom vernaculaire est Triton à bosses, est un gastéropode marin de la famille des Ranellidae. Sa taille peut atteindre 40 cm de long. Selon l’âge il possède 7 à 8 spires.

Il existe fossile au Pliocène (Fontannes 1879-1882) et il vit actuellement à l’ouest de la Mer Méditerranée et, sur la côte atlantique, des Açores à la Manche. Les spécimens entiers de grande taille ont pu servir de contenant (Karali 1999). Des fragments de coquilles ont été perforés pour en faire des pendeloques (Moinat 2007). L’avant dernier tour de spire du coquillage a été employé comme bracelet (Mariéthoz 2007). L’idée de l’utiliser comme un simple instrument d’appel puis d’un instrument de musique est certainement venue à l’homme dès le Paléolithique. L'exemplaire de la couche aurignacienne de la grotte de Marsoulas en Haute-Garonne (Bégouen et al. 1933) a été envisagé comme un récipient pour boire par l’ouverture sommitale qui se serait polie à l’usage. Une nouvelle étude de cette pièce révèlera qu’elle a certainement été exploitée comme instrument sonore et/ou de musique car la cassure est située au bon emplacement.

La transformation expérimentale de la conque marine (figure 1) a été calculée à partir de l’observation d’objets archéologiques et ethnologiques.

 

1/ SUPRESSION DES PREMIERES SPIRES

 

Les parties en relief des coquillages, rejetés sur les plages, accusent fréquemment des usures et des fractures causées par l’action marine sur un fond sableux et un substrat rocheux. Les gastéropodes subissent principalement la cassure de l’apex et divers niveaux des premiers tours. La bordure des fractures est discontinue, brute ou émoussée selon le cas.

A partir de ces observations générales, serait-il possible de faire la distinction entre la fracture naturelle irrégulière d’un apex de Charonia, entre deux spires, et la fracture intentionnelle par percussion de l’extérieur vers l’intérieur qui provoquerait une bordure semblable (Deramaix 1992), pour reproduire un schéma naturel ?  Dans l’immédiat, il n’est pas possible de recourir à l’expérimentation, faute de coquillages entiers à disposition ayant les mêmes caractéristiques biométriques  que celles des éléments archéologiques.

La méthode employée sur un spécimen entier, par J-M. Strangi, a été celle du sciage au moyen de deux outils en silex entre la 5e et la 6e spires. Le travail a tout d’abord consisté à creuser, à l’aide d’un éclat lamellaire, une rainure régulière et peu profonde sur le pourtour jusqu’à ce que les deux extrémités se rejoignent (fig. 1). Cette opération préalable a permis d’éviter d’obtenir une gorge hélicoïdale. Le sciage a ensuite été repris à l’aide d’une lame en silex plus grande et moins fragile. Le travail effectué en deux temps a permis de scier facilement et très précisément le coquillage. La bordure de l’embouchure présente quelques aspérités (fig. 2). L’expérimentateur avait déjà utilisé cette méthode pour scier les épiphyses des os longs d'oiseaux, comme une Ulna de vautour par exemple, pour en faire des flûtes. 

Un autre procédé consisterait à scier le test, à l’aide d’une ficelle imprégnée de sable, entre deux tours, jusqu’à la séparation des deux parties.

2 / PREPARATION DE L’EMBOUCHURE

 

Expérimentalement, le coquillage peut fonctionner au premier stade de son raccourcissement naturel bien que cela provoque une gêne. Il est souhaitable de poncer la bordure du test, à l’aide d’un fragment de roche abrasive, afin d’égaliser l’embouchure. L’épaisseur irrégulière pourrait ensuite être polie avec un cuir imbibé de sable fin mouillé pour effacer la moindre aspérité. J-M. Strangi a, pour sa part, poncé l'embouchure avec une pierre de grès fin et l’a ensuite polie sur le pelage d’une peau (fig. 3). Le contact répété des lèvres sur l’embouchure entraînera une surface luisante.

 

3 / L’INSTRUMENT

 

En fonction de la taille du coquillage et de la manipulation de la personne, l’instrument émettra une sonorité particulière. La conque marine, devenue un instrument sonore, sert d’avertisseur pour différents motifs.

Des coquilles de Charonia de 9,1 cm  à 19 cm de longueur conservée, provenant de la grotte d’Arene Candide en Italie, ont été considérées comme des instruments de musique (Cortese et al. 2004). Le son émis par chaque coquillage a donné l’équivalent d’une note de musique précise. Du son à la musique : il est possible de moduler le son en pratiquant d’autres maniements pour en tirer quelques petites mélopées.

 

Bibliographie

 

Bégouen (Le Comte),  Russel J.-T. (1933) : La campagne de fouille de 1931 à Marsoulas, Tarté et Roquecourbère. Mission franco-américaine de recherches préhistoriques, éd. Privat, Toulouse, p. 4-19.

 

Cortese G. E., Del Lucchese A., Garibaldi P. (2004) : Charonia sp., uno strumento musicale del Neolitico ? Museo Tridentino di Scienze Naturali, Trento 2005, Prehistoria Alpina, Suppl. 1, Vol. 40, pp. 91-96.

 

Deramaix I. (1992) : La collection Siret à Bruxelles. 1. Néolithique et Chalcolithique. Monographie de Préhistoire générale 1, Musées royaux d'art et d'histoire, Bruxelles, 115 p.

 

Fontannes F. (1879-1882) : Les invertébrés du Bassin tertiaire du Sud-Est de la France. Les mollusques pliocènes de la vallée du Rhône et du Roussillon. Tome I, Gastéropodes des formations marines et saumâtres.

 

Karali L. (1999) : Shells in Aegean Prehistory, BAR International Series 761, 138 p.

 

Mariethoz F. (2007) : Variabilité des pratiques funéraires en Valais autour de 4000 av. J.-C. In : Moinat P., Chambon P. (Dir.), Les cistes de Chamblandes et la place des coffres dans les pratiques funéraires du Néolithique moyen occidental. Actes du colloque de Lausanne, 12 et 13 mai 2006. Lausanne : Cahiers d'archéologie romande / Paris : Société préhistorique française ; Cahiers d'archéologie romande, 110 / Mémoires de la Société Préhistorique Française, 43, pp. 265-276, 9 fig.

 

Moinat P. (2007) : Cistes en pierre et coffres en bois, inhumations simples et dépôts complexes : un bilan des pratiques funéraires à Vidy (Lausanne, Vaud) et à Chamblandes (Pully, Vaud). In : Moinat P., Chambon P. (Dir.), Les cistes de Chamblandes et la place des coffres dans les pratiques funéraires du Néolithique moyen occidental. Actes du colloque de Lausanne, 12 et 13 mai 2006. Lausanne : Cahiers d'archéologie romande / Paris : Société préhistorique française (Cahiers d'archéologie romande ; 110 / Mémoires de la société préhistorique française ; 43, pp. 195-220, 20 fig.


publié dans :

PAUC P., STRANGI J-M. 2009 :

Charonia lampas lampas L. : du coquillage à l’instrument sonore. Langage de pierre, La restitution du geste en préhistoire. Colloque européen, sous la direction de B. Roussel et P.-J. Texier, C. Dumas, Ed. Musée des Baux, Maison Cazenave, pp. 40-42.

La publication du racourcissement de deux petits Charonia, par 2 autres méthodes est prévue et sera mise en ligne ici.

Dailymotion : aérophone 

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